Lorsqu’on diagnostique à Nai Nai un cancer du poumon en phase terminale, la conspiration du silence fait interdiction aux membres de sa famille de révéler à la patriarche la vérité. Bili, sa petite fille, qui vit aux États-Unis avec ses parents est effondrée par cette nouvelle et révoltée par ce mensonge. L’organisation opportune du mariage d’un cousin va lui permettre de revenir une dernière fois auprès de sa grand-mère adorée.
L’Adieu est sorti aux États-Unis l’été dernier. Tourné avec un budget de trois millions de dollars, il en a raflé vingt au box-office. Son actrice principale, la rappeuse Awkwafina a remporté le Golden Globe de la meilleure actrice dans une comédie, le premier décerné à une actrice asiatique.
Le succès public et critique de L’Adieu tient à la combinaison de deux facteurs. Le premier est son sujet, lacrymal à souhait : la maladie d’une grand-mère entourée de l’affection de sa famille. La seconde est son public-cible : la communauté sino-américaine tiraillée entre sa fidélité à ses origines et son expatriation loin de l’Empire du milieu. Après le succès de Crazy Rich Asians et de la série Fresh Off the Boat – qui raconte la vie d’une famille taïwanaise en Floride – L’Adieu exploite un filon prometteur. On pariera sans grand risque que les années à venir verront se multiplier ce genre de films et d’histoires, à cheval sur les deux rives du Pacifique.
Nous, Européens, risquons de nous sentir très loin des personnages de L’Adieu. Un cinéphile sur Twitter évoquait « l’impression désagréable de regarder une fête de famille à laquelle on n’a pas été invité ». Ce serait en vérité faire à L’Adieu un mauvais procès. la douleur ressentie à l’annonce de la maladie fatale d’un être aimé, l’hésitation à lui en révéler l’ampleur ou à lui laisser le bénéfice de l’ignorance, le besoin de lui consacrer le plus de temps et d’amour avant l’issue fatale sont des sentiments universels propres à émouvoir sous toutes les latitudes.
Le problème est plutôt la pauvreté de ce seul ressort, sur lequel le film repose tout entier. C’était d’ailleurs un peu aussi le défaut rédhibitoire de Crazy Rich Asians : être construit tout entier autour d’une seule idée, sans nuances ni bifurcations. Crazy Rich Asians mettait en scène des « Chinois pétés de thune » ; L’Adieu a pour héroïne une petite-fille dévastée par l’annonce de la mort prochaine de sa grand-mère. Point. C’est touchant. Mais c’est peu. Le jury des Oscars ne s’y est pas trompé qui n’a nommé L’Adieu dans aucune de ses catégories.