Toute ressemblance avec une personne existante ou ayant existé ne serait pas purement fortuite. Aline Dieu, c’est Céline Dion. Une Céline Dion qui ne prétendrait pas à la parfaite authenticité, pour permettre à Valérie Lemercier quelques libertés avec la réalité – et lui éviter aussi des tracas juridiques.
Ce vrai-faux biopic était attendu depuis de nombreux mois. Sa sortie prévue en novembre 2020 a été repoussée une première fois en février 2021 puis en novembre.
Valérie Lemercier a joué dans tellement de comédies, elle a un tel potentiel comique, qu’on pourrait croire que Aline est une parodie. Ce serait faire un grave contresens. Loin de se moquer de la chanteuse québécoise, Valérie Lemercier signe un biopic bienveillant, dépourvu de toute ironie.
Il y aurait eu pourtant matière à moquerie dans la carrière de la chanteuse, dans son goût pour le kitsch et le bling-bling, dans son répertoire désespérément sirupeux. Et il y aurait eu de quoi médire aussi sur sa relation avec son manager, René Angélil, de vingt-six ans son aîné, qui la découvrit quand elle n’était encore qu’une enfant, l’épousa en 1994 et eut avec elle trois enfants en 2001 et 2010 avant de mourir en 2016 d’un cancer de la gorge. Mais ce n’est pas le parti pris retenu par Aline qui raconte au contraire une histoire d’amour au premier degré.
Le film repose sur les épaules de Valérie Lemercier qui en assure la réalisation, en a co-écrit le scénario et en interprète le rôle principal. Seul aspect qu’elle a accepté de déléguer : ce n’est pas elle mais une chanteuse nommée Victoria Sio qui interprète les titres de Céline/Aline.
Valérie Lemercier est époustouflante de charisme, de présence, de justesse. Elle administre avec éclat la preuve qu’aucune Camille Cottin ne saura jamais la détrôner. On voit mal comment le César de la meilleure actrice pourrait lui échapper en mars prochain (elle a déjà obtenu deux fois celui de la meilleure actrice dans un second rôle pour Les Visiteurs en 1994 et Fauteuils d’orchestre en 2007).
Pour autant, Aline souffre d’une tare congénitale. Sa bienveillance à l’égard de son sujet, son refus de toute dramatisation (il n’y a pas de « méchant » dans le film) le privent de tout enjeu. Tout se déroule selon une lente et interminable chronologie (le film dure deux heures mais j’ai eu l’impression qu’il en durait le double) : l’enfance d’Aline auprès de ses treize frères et sœurs (la partie peut-être la plus réjouissante du film qui m’a rappelé le tempo effréné d’Amélie Poulain), la révélation de son talent, la gloire soudaine et l’histoire d’amour qui se noue avec son manager.
Il ne manque pas un bouton de guêtre – ni un stiletto – à cette émouvante biographie. On ne peut qu’être emporté par la communicative énergie qui s’en dégage. Mais c’est précisément son absence de faiblesse, de défaut qui fait de cet objet trop lisse, trop parfait, un film qu’on admirera mais qu’on n’aimera pas nécessairement.