Alors qu’il approche de la cinquantaine, Nicolas Burlaud, un vidéaste marseillais, est foudroyé par une crise d’épilepsie. Une batterie d’examens révèle une alteration de son hippocampe, une structure de l’encéphale qui joue un rôle central dans la mémoire. Cette révélation le conduit à s’interroger sur son travail au sein de la chaîne de télévision locale Primitivi.
Tout intrigue dans ce film : son titre, qui peut susciter bien des confusions (les fils qui se shootent ? les fils qui se couchent ? qui se mouchent ? qui se douchent ?), son affiche, son sujet même. Nicolas Burlaud commence par nous administrer une leçon de neurosciences qui, selon qu’on n’y connaisse rien ou qu’on ait quelques notions de médecine, pourra sembler sembler trop obscure ou trop simplificatrice.
Il est plus pertinent quand il évoque son travail depuis un quart de siècle dans une télé anarchiste et libertaire – qui se revendique de l’esprit des radios libres des années 80. Les émissions qu’il y a réalisées ont documenté la vie des Marseillais, notamment des quartiers Nord voués à la destruction de leur logement ou de la rue d’Aubagne menacés par l’insalubrité. Nicolas Burlaud s’interroge sur la manière dont s’est constituée une mémoire collective, qui n’est ni la somme ni la moyenne des mémoires individuelles.
Alors qu’il éprouve dans sa chair la crainte de perdre sa propre mémoire, Nicolas Burlaud nous alerte sur les risques qui pèsent sur notre mémoire collective. Ses traces s’évaporent, comme celles de plus en plus évanescentes que nous montre l’urbaniste Nicolas Mémain qui témoignent des actions contestataires dont Marseille a été le théâtre. Elles sont recouvertes par les classes dominantes qui essaient d’imposer leur récit lénifiant, nous dit le réalisateur qui ne cache pas ses opinions anarchistes et anticapitalistes.
C’est un passionnant sujet pour les historiens qui s’en sont d’ailleurs emparés depuis longtemps. On ne compte plus les livres ou les colloques sur Mémoire et Histoire, qu’il s’agisse de la traite négrière, de la Shoah, de la Guerre d’Algérie ou de l’immigration. On a l’impression hélas que le réalisateur de ce documentaire autobiographique ignore ce courant de recherches et en découvre candidement l’existence.