Chroniques d’Haïfa – Histoires palestiniennes ★★☆☆

Une famille arabe aisée d’Haïfa a bien des soucis. La société d’assurances que dirige le père est au bord de la faillite. La mère est plongée dans les préparatifs du mariage de sa fille aînée et aimerait que ses deux autres enfants prennent exemple sur elle. Mais ni l’un ni l’autre n’en prennent le chemin. Son fils, Rami, entretient une liaison avec une hôtesse de l’air juive qui lui annonce qu’elle est enceinte. La benjamine, Fifi, étudie à Jérusalem mais donne du fil à retordre à sa mère.

Scandar Copti avait co-réalisé en 2009 un portrait en creux de la ville de Jaffa, au sud de Tel-Aviv. Seize ans après ce film unique, il récidive cette fois ci dans le nord du pays, à Haïfa, la troisième ville d’Israël, réputée pour son multi-confessionnalisme : la ville abrite une importante population arabe et est la capitale spirituelle du baha’isme.

Scandar Copti n’épargne rien ni personne. Il a la dent dure avec les fondamentalistes juifs qui se battent contre les unions mixtes. Il l’a tout autant avec le patriarcat qui prévaut au sein des familles palestiniennes et qui dicte aux jeunes filles le choix de leur époux ou, pire, leur interdit toute relation sexuelle avant le mariage. Le portrait qu’il dresse de la famille de Fifi n’est pas tendre sinon pour la benjamine, campée par une jeune actrice solaire, Manar Shehab.

Prix Orizzonti du meilleur scénario à la Mostra 2024, Chroniques d’Haïfa vaut surtout par sa construction. Il est organisé en quatre chapitres, chacun offrant des mêmes faits une version légèrement décalée dans le temps et différente, façon Rashomon. Cet entrelacs particulièrement subtil stimule l’intelligence du spectateur et lui interdit de relâcher son attention. Chaque détail compte qui, mystérieux ici, s’éclairera plus tard à travers la narration d’un autre protagoniste. Ainsi de l’accident de voiture dont est victime Fifi dans la première scène du film.

On aurait aimé dire que Chroniques d’Haïfa esquisse la possibilité d’un vivre-ensemble en Israël comme le font les films d’Amos Gitaï, un natif de cette ville. Hélas, Scandar Copti ne cède pas à l’irénisme.

La bande-annonce