« Saravah n’est pas un documentaire mais un document » écrit l’éditeur Patrick Frémeaux. C’est l’oeuvre de Pierre Barouh, un musicien français né en 1934. Il composa La Bicyclette pour Yves Montand et interpréta Un homme et une femme sur une composition de Francis Lai. Durant ce tournage il rencontra Anouk Aimée à laquelle il fut marié pendant trois ans. Il fonda en 1965 le label Saravah qui fit découvrir la bossa nova en France et émerger les talents de Jacques Higelin ou de Brigitte Fontaine. En voix off, au début du film, il se présente comme « le plus Brésilien des Français » et adresse au spectateur une invitation qui ne se refuse pas : l’emmener en voyage au Brésil.
Saravah fut tourné en trois jours à peine à Rio de Janeiro pendant le carnaval durant l’hiver 1969. Mal sonorisé, le film ne sortit jamais en salles. Mais grâce à une restauration impeccable, il en trouve enfin le chemin plus de soixante ans plus tard.
Saravah dure une heure à peine. C’est bien court, mais cela nous donne juste le temps de croiser quelques unes des légendes de la samba brésilienne qui interprètent à l’improviste ses classiques. Un immense sourire aux lèvres, Pierre Barouh, dans un portugais hésitant, les invite à se dévoiler ce qu’elles font volontiers. Certains sont des stars installées, tel le saxophoniste Pixinguinha qui habite une rue qui porte son nom ; d’autres sont en pleine ascension comme le guitariste Baden Powell ou la chanteuse Maria Bethânia.
Voir Saravah aujourd’hui, c’est (re)plonger dans le Brésil des années soixante dont le carnaval et le samba constituaient des échappatoires hédonistes à l’oppressante dictature militaire. C’est se laisser lentement gagner par l’émolliente douceur de cette musique si sensuelle. C’est immanquablement n’avoir à la sortie de la salle qu’une seule envie : se ruer sur les autres standards créés par ces musiciens de légende.