Disco Afrika ★☆☆☆

Kwamé, un jeune malgache parti prospecter des saphirs, revient chez lui à Tamatave, avec la dépouille de son ami, tué par les militaires. Il retrouve sa mère qui accepte enfin de lui parler de son père, mystérieusement disparu quand Kwamé était encore enfant. Alors qu’il mène l’enquête sur les causes de son décès, Kwamé est entraîné par Idi, un ami d’enfance, dans un trafic lucratif.

Les films qui nous viennent de Madagascar sont trop rares pour être ignorés. J’avais vu en 2005 Mahaleo, un documentaire musical, et j’ai bêtement cru que Disco Afrika en serait un lui aussi. Or il n’en est rien. Disco Afrika est un film de fiction dont le titre renvoie au passé du père de Kwamé, chanteur et bassiste d’un petit groupe de musique.

Le titre, décidément piégeux de ce film, n’est pas son seul handicap. La direction d’acteurs est trop lâche. Si le personnage principal, interprété par Parista Sambo, sort son épingle du jeu, les rôles secondaires sont caricaturaux : la mère éplorée, le père de substitution, le petit malfrat aux cheveux calamistrés…. Le scénario aussi est bien faiblard, qui retarde d’une bonne demi-heure le début de l’histoire alors que le film pourtant ne dure qu’une heure vingt à peine. Enfin la mise en scène manque de rythme, ce qui se ressent dans les scènes d’action.

Restent néanmoins cette langue malgache aux sonorités si étonnantes, une BOF très riche et des paysages exotiques et délicieusement dépaysants.

La bande-annonce

La Petite Dernière ★★★☆

Fatima est la « petite dernière » d’une fratrie de trois sœurs d’origine algérienne qui vivent dans le 9.3 avec leur père et leur mère. Le bac approche qui lui ouvrira – car elle est bonne élève – les portes de la faculté de philosophie. Fatima est pieuse et fait ses prières. Elle a des copains au lycée et même un petit ami qu’elle retrouve en cachette pour se protéger des ragots. Mais au fond d’elle-même, Fatima se sent plus attirée par les filles que par les garçons.

Adapté du roman autobiographique de Fatima Daas, La Petite Dernière (Noir sur blanc, 2020), le dernier film de Hafsia Herzi, en sélection à Cannes, raconte la lente et douloureuse émancipation d’une jeune lesbienne musulmane, prisonnière des préjugés et des tabous religieux.

Le sujet fait évidemment écho à celui de La Vie d’Adèle. Et ce film-ci souffre de la comparaison avec ce film-là. Pour le résumer en une phrase, j’ai trouvé que La Petite Dernière, c’était La Vie d’Adèle… en juste un peu moins bien.

Comme dans La Vie d’Adèle, j’ai été profondément touché par la sensibilité avec laquelle La Petite Dernière prenait à bras le corps le thème de la sexualité féminine, sans tomber dans le double écueil du voyeurisme ou du sentimentalisme. La Petite Dernière trouve le ton juste pour décrire les affres amoureux de la jeune Fatima, inhibée par sa propre timidité, coincée entre une famille aimante à laquelle pourtant elle ne peut rien avouer et des autorités religieuses qui condamnent sans appel sa « déviance ». Elle sait pour autant pouvoir compter sur un environnement permissif, qu’elle découvre lorsqu’elle met le pied à l’Université, et sur des amis sincères et fidèles.

Fatima rencontre l’amour en la personne de Ji-Na, une jeune infirmière d’origine coréenne. L’actrice qui l’interprète tenait le rôle principal d’un film franco-coréen que j’avais beaucoup aimé, Retour à Séoul. Sa grâce, sa sincérité m’ont profondément ému.

Au contraire, j’ai détesté l’actrice principale, pourtant récompensée par le prix d’interprétation féminine à Cannes. Je lui ai trouvé le même jeu buté et antipathique que je reproche à Hafsia Herzi qui la dirigea. On pourrait considérer que cette hostilité cache sa timidité. Mais l’excuse vaudrait si on voyait Fatima s’ouvrir. Or, du début à la fin, elle conserve la même mine renfrognée qui me fait hautement douter de son talent et questionner sa récompense.

La bande-annonce

Berlinguer, la grande ambition ★★☆☆

Enrico Berlinguer a dirigé le Parti communiste italien de 1972 à sa mort en 1984. Ce biopic d’Andrea Segre (L’Ordre des choses, La Petite Venise) se concentre sur les années 1973-1978. Au début : le voyage piégeux de Berlinguer en Bulgarie où il manque d’être assassiné par les sicaires de Todor Jivkov. À la fin : l’assassinat sordide d’Aldo Moro, le chef de la Démocratie chrétienne par les Brigades rouges. Entre ces deux dates, un double mouvement : Berlinguer s’emploie à s’affranchir de la tutelle de l’URSS et à conclure avec la Démocratie chrétienne, dont le début du déclin lui avait fait perdre sa majorité à la Chambre, un « compromis historique ».

Andrea Segre  a ressuscité une figure oubliée de la politique italienne, celle du secrétaire général du Parti communiste à l’époque où celui-ci était le plus puissant d’Europe occidentale, au point d’arriver aux portes du pouvoir, au grand dam des Américains. N’oublions pas qu’en France, à la même époque, Georges Marchais signait avec François Mitterrand le Programme commun qui permit la victoire du leader socialiste aux élections présidentielles de 1981… ce qui marqua le début de l’inexorable déclin du PC qui quitta le Gouvernement dès 1984.

Ce biopic a remporté un succès étonnant en Italie où il est sorti l’an dernier. Il a valu à Elio Germano (Suburra, Alaska, America Latina…) le Donatello mérité du meilleur acteur, pour son interprétation habitée.

Berlinguer est un film d’atmosphère et de sensation. Les décors, les maquillages nous font profondément ressentir les situations : les couloirs immenses du Kremlin et la corpulence taurine de Brejnev écrasent le frêle Berlinguer, les airs de chattemite d’Andreotti laissent augurer les compromissions dans lesquelles le PCI risque de se laisser entraîner….

Hélas, pour un film sur la politique, Berlinguer en parle peu. Il nous la montre ; il nous la fait ressentir à travers les effets palpables que l’engagement politique a sur l’homme Berlinguer (à l’instar du documentaire consacré à Laurent Berger sorti la semaine d’après le Dernier Compromis). Mais il échoue à nous faire comprendre, dans toutes ses subtilités, les enjeux de « l’eurocommunisme ».

La bande-annonce

Chien 51 ★★☆☆

Dans un futur proche – comme il est désormais de règle de dater les films dystopiques – Paris est divisé en trois zones quasiment hermétiques les unes aux autres, les plus nantis ayant seuls le droit de vivre dans les îles Saint-Louis et de la Cité et les plus pauvres se trouvant relégués au-delà du périphérique. Grâce aux progrès de l’Intelligence artificielle, la sécurité est assurée par un système panoptique dénommé ALMA, qui peut s’appuyer sur la reconnaissance faciale des individus, obligatoirement munis d’un bracelet géolocalisable, et sur une armée de drones.
Quand Kessel, l’inventeur d’ALMA, est froidement abattu, deux policiers, Zem (Gilles Lellouche) et Salia Malberg (Adèle Exarchopoulos) sont chargés de mener l’enquête.

Chien 51 n’est pas sans qualités. Il se déroule dans un Paris dystopique à la Blade Runner avec un mélange visuellement éblouissant de technologies futuristes, de luxe et de crasse. Son scénario testostéroné multiplie, de la première à la dernière minute, des courses-poursuites qui ne laissent pas le temps de s’ennuyer. Il est porté par une sacrée pléiade d’acteurs, à commencer par ses deux têtes d’affiche, très convaincantes, sans oublier sa kyrielle de seconds rôles : Louis Garrel, Valéria Bruni Tedeschi, Artus, Daphné Patakia… Avec toutefois une seule objection pour Romain Duris, caricatural et peu crédible dans le rôle du ministre de l’intérieur.

Mais hélas, Chien 51 a au moins autant de défauts. Le premier est de trahir le roman de Laurent Gaudé – qui se déroulait à Athènes et était autrement plus complexe que le blockbuster simpliste qu’en a tiré Cédric Jimenez. On a l’impression – et on peine à l’en blâmer – que le réalisateur de Bac Nord et de Novembre fait ce qu’il sait faire : du cinéma d’action. Grâce à lui – et à quelques autres – le genre n’est plus aujourd’hui un monopole hollywoodien. Mais on peut regretter qu’il applique au livre de Laurent Gaudé la même méthode que le restaurateur peu consciencieux au steak tartare : passer son matériau à la moulinette pour en tirer un produit certes comestible mais aseptisé.

La bande-annonce

Marcel et Monsieur Pagnol ★☆☆☆

Sur la suggestion du petit-fils de Marcel Pagnol, Sylvain Chomet raconte la vie de ce Marseillais de génie, auteur de la trilogie Marius, Fanny, César, de Jean de Florette et de Manon des sources, de La Femme du boulanger, et qui rédigea au crépuscule de sa vie alors qu’il pensait que l’inspiration l’avait quitté ses souvenirs : La Gloire de mon père, Le Château de ma mèreLe Temps des secrets et un quatrième tome qu’on omet souvent, Le Temps des amours.

On retrouve dans son film d’animation toute la chaleur et la truculence des oeuvres précédentes de Sylvain Chomet. Elles étaient muettes. Celle-ci est parlante. Mais pas sûr qu’on y gagne, l’accent méridional forcé des personnages frôlant souvent la caricature. On y perd surtout la fantaisie presque surréaliste qui faisait tout le piment des Triplettes de Belleville ou de L’Illusionniste.

Ce biopic trop sage raconte la vie de Marcel Pagnol de sa naissance en 1895 jusqu’à sa mort en 1974, comme le ferait une notice Wikipédia. Rien n’y manque de son attachement à la Provence qui nourrit toute son oeuvre, de l’énumération de la quasi-totalité de ses pièces et de ses films, depuis les plus connus jusqu’aux plus méconnus (Les Marchands de gloire, Jazz, Fabien…), des détails de sa vie privée (le décès prématuré de sa mère qui le laisse orphelin, la tutelle étouffante de son père, son exil à Paris, sa vie sentimentale très agitée, la mort de sa fille…)…

Ceux qui connaissent bien l’oeuvre de Pagnol – et c’est mon cas car, en bon méridional, j’ai été biberonné à ses livres en Presses Pocket durant mon enfance – auront le sentiment d’un survol trop superficiel. Je me demande ce qu’en retiendront ceux qui ne la connaissent pas. Quant au procédé, dont le titre se fait l’écho, consistant à ressusciter la figure tutélaire du jeune Marcel pour aider le vieux monsieur Pagnol à rédiger, à la demande d’Hélène Lazareff, ses souvenirs (qui seront la matière de sa célèbre tétralogie), il semble un peu capillotracté et échoue à susciter l’émotion.

La bande-annonce

Le Dernier Compromis ★★☆☆

La documentariste Anne Fonteneau a suivi pas à pas Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, la première centrale syndicale de France, pendant les six derniers mois de ses fonctions début 2023. La période coïncide avec la discussion au Parlement de la réforme des retraites et le bras de fer engagé avec le Gouvernement.

À quoi vous fait penser l’affiche de ce documentaire ? À celle du Parrain avec Marlon Brando ? J’ai interrogé Anne Fonteneau hier soir à la sortie de la salle du Quartier-Latin où elle était venue présenter son film pour savoir si cette ressemblance était voulue ou fortuite. Elle m’a répondu que le maquettiste auquel avait été passée la commande de cette affiche avait reçu le film comme un thriller politique et avait conçu l’affiche à partir de ce point de vue.
Je ne partage pas ce ressenti. Le Dernier Compromis n’est pas un thriller et Laurent Berger n’est pas un chef de clan.

C’est un homme totalement investi dans son travail, qui s’y consacre corps et âme. Anne Fonteneau a manifestement voulu entrer dans son intimité alors que l’homme s’affirme pudique et le restera tout du long. Tout au plus découvre-t-on son goût pour le baby-foot et la chanson française qui lui permettent de décompresser. Mais de l’homme Laurent Berger, on n’apprend rien ou pas grand-chose sinon qu’il a hérité de ses parents son engagement syndical et qu’il a fait ses premières armes dans une humble section de la CFDT à Saint-Nazaire en Loire-Atlantique.
Le documentaire le filme à la fin d’un mandat long de onze années. On ressent à la fois une grande lassitude, un profond épuisement et aussi une anxiété, chez cet homme de cinquante-cinq ans à peine, pour la « vie d’après » : il se sait hyper-actif et redoute une brutale décompression (depuis septembre 2023 Laurent Berger travaille au Crédit mutuel… et reconnaît ouvertement s’y ennuyer un peu).

Le Dernier Compromis est l’occasion de revivre de l’intérieur le conflit des retraites qui a rythmé tout le début de l’année 2023. Ce bras-de-fer s’est piteusement terminé par l’utilisation du 49.3 qui a permis le passage en force de la réforme. On mesure rétrospectivement l’erreur stratégique commise par Emmanuel Macron et sa première ministre. En refusant d’aller au bout du débat parlementaire, il s’est privé de la meilleure issue possible (soit la réforme était votée, démontrant ainsi que le Gouvernement bénéficiait du soutien d’une majorité de parlementaires, soit elle ne l’était pas et le Gouvernement aurait été vaincu la tête haute) et a préféré donné l’image de l’entêtement et de la surdité.

Le défaut de ce Dernier Compromis est de rester à la surface des choses. Il échoue à percer la carapace décidément trop épaisse de Laurent Berger ; il échoue à décortiquer les tenants et aboutissants de la réforme des retraites de 2023. Dommage…

La bande-annonce

Together ★★☆☆

Tim est un musicien raté qui n’a jamais percé, Millie une enseignante dont le salaire fait bouillir la marmite. En couple depuis une dizaine d’années, Tim et Millie n’ont toujours pas décidé de franchir le pas du mariage et de la p/maternité. La nouvelle affectation de Millie les conduit à déménager à la campagne, loin de la ville et de leurs amis. Un jour, ils s’égarent dans la forêt, se réfugient dans une grotte et en sortent le lendemain avec de curieux symptômes.

Je ne suis vraiment pas adepte des films d’horreur. J’en ai vu tout mon saoul à la présidence de la commission de classification, les ai trouvés souvent mauvais et répétitifs…. et horriblement angoissants. Mais l’affiche de Together m’a fait de l’oeil (!) Ne la trouvez-vous pas intrigante ? horrifiante ? J’ai jeté un oeil (bis !) au pitch et ai acheté mon billet.

Je connais mal les films d’horreur. Mais je crois que les meilleurs sont ceux qui filent une métaphore, qui, au-delà des images horrifiques qu’ils montrent, racontent en filigrane autre chose qui résonne avec notre moi profond. The Substance par exemple raconte le corps féminin, la hantise de sa décrépitude, le diktat du rajeunissement…

Together est un film sur le couple. Sur la « bonne » distance entre les  deux membres d’un couple. Sur le désir paradoxal – et souvent asynchrone hélas – de se rapprocher de l’autre ou au contraire de s’en distancier. On y entend 2 Become 1With or Without You de U2 aurait été bien adapté aussi… mais peut-être le budget du film avait déjà été englouti dans l’achat des droits du tube des Spice Girls. L’interprètent Dave Franco et Alison Brie, partenaires à la scène et à la ville.

Comme souvent dans les films d’horreur, Together tangente le grand-guignol. Certaines de ses scènes sont à la fois horribles et hilarantes. Mais, il relève le défi de cet exercice d’équilibriste jusqu’à son tout dernier plan qui nourrit les interrogations des spectateurs au sortir de la projection.

La bande-annonce

Family Therapy ★☆☆☆

Aleksander et Olivia habitent une villa ultra-moderne au cœur de la forêt slovène. Leur fille Agata y vit avec eux pour des motifs qui se révèleront progressivement. Aleksander a eu avant son mariage un fils, Julien (Aliocha Schneider), qui a grandi en France et qui revient s’installer temporairement chez son père.

Family Therapy nous vient de Slovénie. Vérification faite, ce n’est pas le premier, mais le second film slovène que j’aie jamais vu. J’avais bien aimé Conséquences en 2019 sur une jeunesse délinquante, en mal d’affection et de repères.

Family Therapy est un film radical qui rappelle, par la sécheresse de son dispositif, les premiers films de Yorgos Lanthimos (Canine, Alps…). Il met en scène une famille vivant quasiment en autarcie, progressivement étouffée par ses névroses : Aleksander rêve de s’envoler dans l’espace, Olivia cache sa frustration sexuelle, Agata aspire à renouer avec l’adolescence insouciante que la maladie lui a volée… Ce fragile équilibre familial est peu à peu perturbé par des facteurs extérieurs : une famille de touristes qui lui demande de l’héberger après un accident automobile, ce fils prodigue, beau comme le héros de Théorème

L’atmosphère bizarre de Family Therapy est dans un premier temps intrigante. Mais Sonja Prosenc n’a pas su tirer profit du dispositif stimulant qu’elle a mis en place. La seconde partie de son film, avec sa réception mondaine qui rappelle les films de Ruben Östlund, ne tient pas les promesses de la première.

La bande-annonce

Lumière pâle sur les collines ★★☆☆

Etsuko, la cinquantaine, vit dans les années 80 dans la campagne anglaise et vient d’y mettre en vente sa maison. Sa fille Niki vient passer quelques jours chez elle. C’est l’occasion pour les deux femmes de revenir sur le passé de Etsuko qui a grandi à Nagasaki, y a connu l’explosion de la bombe atomique, s’y est mariée et est tombée enceinte au début des années cinquante d’un premier enfant. À Nagasaki, Etsuko s’est liée d’amitié avec une femme, Sachiko, qui a élevé seule son enfant et s’est apprêtée à quitter le Japon pour les Etats-Unis.

Lumière pâle sur les collines est le premier roman de Kazuo Ishiguro, un immense écrivain britannique d’origine japonaise, passé à la postérité pour Les Vestiges du jour (porté à l’écran par James Ivory au début des années 90) et couronné par le Prix Nobel de littérature en 2017. Le roman, pourtant fort bref, est d’une grande complexité. Il multiplie les allers-retours entre le temps présent – la campagne anglaise du début des années 80 – et le Japon de l’immédiat après-guerre qui peine encore à se relever de l’apocalypse nucléaire. Il joue aussi avec les apparences, laissant planer un doute sur la réalité des personnages qui ne sont peut-être que les doubles fantasmés les uns des autres.

Kei Ishikawa avait déjà réalisé en 2022 A Man, un film déconcertant qui lui aussi mettait en scène des personnages aux identités floues. Il se frotte ici à l’adaptation jugée impossible d’un roman d’une grande élégance qui explore de nombreuses pistes : le deuil par le Japon de sa grandeur impériale, sa douloureuse reconstruction, les aspirations à un nouveau départ d’une femme mal mariée, la culpabilité de cette même femme au crépuscule de sa vie…..

Lumière pâle sur les collines est un film métisse, comme l’auteur du roman qui l’a inspiré. C’est un film à cheval entre le Japon et l’Angleterre. Sa facture peut surprendre. Sa beauté – et celle de ses acteurs – peut sembler très artificielle. Autre écueil : l’incompréhension face à un scénario qui ne livre pas spontanément ses clés.

La bande-annonce

À bout de course (1988) ★★★☆

Jeunes militants pacifistes, Arthur et Anne Hope ont fait exploser en 1971 une usine produisant du napalm, blessant accidentellement un gardien. Traqués par le FBI depuis une dizaine d’années, ils fuient la police, avec leurs deux enfants, régulièrement obligés de changer de résidence et d’identités.

Le cycle « Warner Bros 100 ans » permet de (re)voir des chefs d’œuvre : Le Chanteur de jazz, Casablanca, Rio Bravo, 2001, Odyssée de l’espace, Blade Runner…. Au milieu de ces grands classiques se cachent quelques pépites comme ce film un peu oublié que j’avais raté à sa sortie en octobre 1988. L’image mal restaurée, la coiffure des personnages, la musique font immédiatement remonter, qu’on les ait aimées ou détestées, le souvenir inimitable des 80ies.

La nostalgie est d’autant plus forte qu’À bout de course a pour héros le jeune River Phoenix, né en 1970, décédé en 1993, à l’orée d’une carrière prometteuse que son frère cadet, Joaquin, a poursuivie pour lui par procuration.

Le sujet du film est inspiré de faits réels : la longue cavale de deux pacifistes dans les Etats-Unis des 70ies après un attentat meurtrier. C’est une réflexion sur l’engagement, le radicalisme, l’action non violente qui dérape – un sujet d’une brûlante actualité aujourd’hui qu’évoquent notamment Une bataille après l’autre, Sabotage ou Une année difficile – et les conséquences de nos actes.

Mais c’est le personnage de Danny, le fils aîné, interprété par River Phoenix, qui est le plus émouvant. Musicien surdoué, comme sa mère le fut en son temps avant de rompre avec sa famille et d’embrasser le radicalisme, l’adolescent de dix-sept ans ne supporte plus ces déménagements à répétition, qui le privent de toute vie sociale et lui interdisent l’accès à l’Université. Loin d’interpréter les ados rebelles, River Phoenix joue un garçon sage, presque passif, laissant au scénario et aux situations le soin de faire comprendre le poids qui pèse sur lui. Ses parents sont déchirés d’imposer à leur fils un tel sacrifice.

Sidney Lumet réalise À bout de course avec une remarquable économie. L’émotion que suscite son dénouement, qui arracherait des larmes aux plus insensibles, n’en est que plus puissante.

La bande-annonce