Marie, la quarantaine, a une vie passablement compliquée. Criblée de dettes, elle vit dans une caravane dans le Briançonnais. Pour boucler ses fins de mois, elle trafique des cigarettes à la frontière grâce à la complicité de son amant, un policier de la PAF. Un jour, elle recueille sur la route enneigée Souleymane, un réfugié gambien, qui lui suggère d’utiliser son break pour transporter d’autres migrants.
Qui osera dire que le cinéma français n’est pas en prise avec l’actualité ? Depuis quelques années, on voit se multiplier les films mettant en scène des migrants exténués, prêts à tout pour franchir nos frontières, confrontés à de braves Français, touchés par tant de souffrance et leur tendant une main fraternelle. Leur action se déroule alternativement à Calais ou à Briançon : Welcome de Philippe Lioret, Ils sont vivants de Jérémie Elkaïm, Les Engagés d’Emilie Frèche, Les Survivants de Guillaume Renusson….
La Tête froide ressemble à tous ces films dont l’accumulation et la bien-pensance frôlent l’overdose. Mais son héroïne, interprétée par Florence Loiret-Caille, une actrice qui n’aurait jamais atteint le haut de l’affiche sans le rôle de Marie-Jeanne dans Le Bureau des légendes, a l’originalité de n’être pas une « brave » Française. Ce n’est pas un monstre non plus. C’est tout simplement une femme, acculée, en découvert bancaire permanent, que les hasards de la vie, avec une logique que le film décrit très bien, conduit à se transformer en « passeuse ».
Et c’est à ce point là que La Tête froide devient intéressant. Au motif que le trafic d’êtres humains est plus rentable que celui des cigarettes, Marie s’est-elle transformée en monstre ? Ou peut-elle se donner bonne conscience en prétextant qu’elle offre à ces malheureux une façon plus sûre et plus confortable de traverser une frontière enneigée où ils risqueraient de perdre la vie s’ils tentaient de la franchir à pied ?
Ce dilemme n’est bizarrement pas assez creusé, même si c’est sur lui que tout le film repose. La Tête froide a le tort, dans son dernier tiers de se perdre dans les hauteurs enneigées – comme l’affiche du film l’annonce sans crainte du divulgâchage.