Bye bye Tibériade ★★☆☆

Lina Soualem plonge dans les archives familiales pour raconter l’histoire de sa mère Hiam Abbas, née en Palestine en 1960. Sa grand-mère, Um Ali, avait dû fuir Tibériade en 1948 lors de la création d’Israël. Sa maison détruite, sa famille éclatée (l’une de ses filles s’est retrouvée en Syrie dont elle ne put jamais revenir), elle s’installa à Deir Hanna, à mi-chemin entre Acre et Tibériade. C’est là que vécut Nemat, sa mère, qu’elle y devint institutrice, qu’elle y fonda une famille bientôt riche de dix enfants. Hiam, la quatrième, se sentait étouffer dans ce milieu patriarcal. Elle partit le plus vite possible étudier la photographie à Haïfa, avant d’intégrer une troupe de théâtre à Jérusalem, de se marier contre la volonté de ses parents avec un Anglais et d’aller vivre à Londres avant de s’installer à Paris en 1989, sans parler un mot de français.

Lina Soualem creuse le sillon qu’elle avait déjà ébauché dans son premier documentaire, Leur Algérie, consacré à ses grands-parents paternels (les parents de l’acteur bien connu Zinedine Soualem). Bye bye Tibériade est un documentaire à la fois intime et pudique. Comme son titre l’annonce, il est placé sous le signe de la nostalgie. Lina Soualem veut garder le souvenir, qui est en train de se perdre après la mort de sa grand-mère Nemat, de la vie de quatre générations de femmes palestiniennes.

Derrière la micro-histoire de cette famille, c’est l’Histoire de la Palestine qui se dessine, celle de la Nakba de 1948, celle de la difficile coexistence des deux peuples israélien et palestinien, sur une même terre minuscule, celle de la revendication sans cesse renaissante mais toujours bâillonnée de l’indépendance et de la souveraineté.

La vraie héroïne du film est Hiam, la mère de Lina. Ses traits nous sont devenus familiers, à force de l’avoir vue depuis plus de trente ans dans une kyrielle de films : La Fiancée syrienne, Free Zone, Munich, Les Citronniers, Corps étranger, Gaza mon amour… Comment une telle artiste est-elle née dans un tel milieu ? Comment sa sensibilité s’y est-elle aiguisée ? Pourquoi est-elle partie ? Comment s’est-elle réconciliée avec ses parents ? Autant de questions qui ne sont pas traitées de front mais auxquelles, par bribes successives, des réponses partielles et pudiques sont apportées.

La bande-annonce

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