Et les mistrals gagnants ★☆☆☆

Épidermolyse bulleuse, insuffisance rénale, neuroblastome… Ambre, Charles, Camille, Tugdual et Imad ont entre six et neuf ans. Ils sont atteints de maladie grave. Certains n’en guériront pas. La documentariste Anne-Dauphine Julliand les filme.

Difficile de ne pas se laisser attendrir par des enfants malades qui, en dépit du calvaire qu’ils traversent, conservent inaltérablement leur joie de vivre. Difficile d’émettre un jugement critique sur un documentaire qui fait de la souffrance enfantine son sujet principal.

La bande-annonce du documentaire de Anne-Dauphine Julliand se suffit à elle-même. On ne peut la regarder sans être doublement ému. Ému devant la fragilité de ces touts petits bonhommes frappés par des maladies lourdes dont certains ne se relèveront pas (quoi de plus déchirant que d’évoquer « la fin de vie » d’une enfant de neuf ans et les « soins palliatifs » qu’elle pourrait recevoir ?). Ému devant leur vitalité, la réalisatrice ayant l’intelligence de ne filmer ni leur douleur ni leurs larmes mais au contraire les pages les plus lumineuses de leurs éclats de vie.

Pour autant, on ne peut pas ne pas être vaguement mal à l’aise devant cette entreprise qui ne nous laisse d’autre alternative que l’empathie. Ce documentaire nous kidnappe. Il est des kidnappings plus malhonnêtes et plus désagréables. Celui-ci n’en est pas moins un pour autant.

La bande-annonce

Les Bureaux de Dieu ★★☆☆

Avant de tourner Le Concours qui est sorti le 8 février sur nos écrans ou Le Bois dont les rêves sont faits en 2016, Claire Simon avait réalisé en 2008 ce film sur le planning familial.

La documentariste aime circonscrire son sujet et n’en pas sortir : la Femis, le bois de Vincennes ou la gare du Nord. Ici, elle installe sa caméra dans les locaux d’une agence du Planning familial et n’en sort pas. Défilent des femmes qui cherchent des réponses à leurs questions sur la sexualité, la contraception, l’avortement.

Les saynètes se succèdent, avec le risque parfois de créer un effet de monotonie. Telle jeune fille se plaint d’un retard de règles et demande la pilule du lendemain. Telle autre a passé les délais légaux pour une IVG en France et se voit recommander d’aller en Espagne.

Aucun militantisme dans l’attitude des personnels du Planning. C’est le bien-être des patients qui leur importe. Ils ne les poussent ni à interrompre ni à poursuivre leur grossesse, mais à prendre un choix éclairé et libre.

Le procédé utilisé par Claire Simon pour réaliser ce quasi-documentaire soulève quelques interrogations. Elle a choisi de confier les rôles des personnels sociaux à des acteurs connus : Nathalie Baye, Nicole Garcia, Béatrice Dalle, Michel Boujenah… On imagine qu’il y a derrière chacune de ces participations un engagement personnel. Cet engagement n’a en soi rien de critiquable. Mais c’est le résultat qui l’est plus : le mélange d’acteurs professionnels et amateurs et la reconstitution (sur)jouée de situations qu’on imagine volontiers que la documentariste a rencontrées en période d’observation.

La bande-annonce

Brothers of the Night ★☆☆☆

L’affiche hyperstylisée laisse augurer un film esthétisant sinon fétichiste louchant du côté de Rainer Fassbinder ou de Gregg Araki. Pourtant « Brothers of the Night » (bizarre titre français traduit de l’autrichien »Brüder der Nacht ») est un documentaire qui n’a rien de poétique. Il a pour sujet un groupe de Roms d’origine bulgare qui appâtent les clients du Rüdiger, un bar gay du centre de Vienne.

Rien ne prédisposait ces jeunes machos hypervirils, mariés et pères de famille, à ce « business ». Sinon l’extrême misère qui les a poussés hors de leur pays vers l’Occident et ses richesses fantasmées. Yonko, Stefan, Vassili, Asen n’ont que mépris pour les « pédés ». Le film explore ce paradoxe : comment des hétérosexuels pur jus peuvent-ils être conduits à devenir des gitons ?

Le sujet est glauque. Hélas il le reste. Car le documentaliste Patric Chiha prend le partie de ne pas s’échapper du cercle réduit de ces jeunes garçons. On ne verra jamais leurs clients pas plus qu’on ne verra leurs familles restées au pays. Du coup, le matériau se réduit aux témoignages, suscitées ou spontanées, de ces travailleurs du sexe qui racontent leur parcours, leur arrivée à Vienne avec l’espoir d’un travail et d’un salaire, leur découverte du Rüdiger et de son sale « business », leur dégoût, puis leur lente accoutumance.

Qu’entend-on ? Des histoires tristement répétitives dominées par la quête obsessionnelle de l’argent : l’argent qu’il faut extorquer au client, l’argent qu’il faut envoyer au pays. Qu’en retenir ? Que ces garçons sont des victimes ? Ils exercent ce « business » de leur plein gré et ne font partie d’aucune filière. Que ce sont des monstres froids et sans morale ? Leur procès n’est instruit ni à charge ni à décharge (si on ose dire). Que leur machisme est une posture fragile sous laquelle transperce une sexualité plus ambigüe qu’ils ne le pensent ? Ce serait donner plus de signification qu’elles n’en ont à certaines manifestations d’une simple amitié masculine.

À force de maintenir son sujet à distance, à force de s’interdire toute empathie, « Brothers of the Night » glace et lasse.

La bande-annonce

Yourself and Yours ☆☆☆☆

Comme tous les films du réalisateur coréen Hong Sangsoo, le scénario de celui-ci pourrait tenir sur un timbre poste. Un homme et une femme. Une rupture. D’impossibles retrouvailles.

Depuis une dizaine d’années, Hong Sangsoo s’est fait un nom dans les festivals du cinéma. Comme les livres de Christian Bobin jadis, vite écrits et interchangeables, ses films sont immédiatement reconnaissables. Des histoires d’amour malheureuses dans la Corée d’aujourd’hui. Un homme – souvent cinéaste ou peintre – une femme – plus jeune que lui, souvent une étudiante. Une rencontre. Des discussions autour d’un verre. Une séparation dans les vapeurs de l’alcool. Une gueule de bois nostalgique au petit matin.

Certains grands créateurs ont sans cesse revisité les mêmes schémas : Bach ou Vivaldi en musique, Ozu ou Rohmer au cinéma. Le bât blesse lorsque ces schémas tournent à vide. Et c’est le cas pour Hong Sangsoo. Pour pratiquer l’art de la fugue, encore faut-il savoir fuguer.

On peine pour ses acteurs qu’il abandonne avec deux lignes d’indication à des improvisations parfois touchantes, souvent embarrassantes, toujours répétitives. Leurs dialogues sont filmés en plans fixes interminables. Pour leur donner un peu de rythme, le cadreur procède à de brusques zooms que ne s’autoriserait pas un lycéen de première option cinéma.

J’avais eu la dent moins dure avec son dernier film en date Un jour avec, un jour sans découpé en deux parties à la fois semblables et différentes. Mais ici, le trouble créé autour de l’identité de Minjung (cette femme n’est-elle ni tout à fait la même ni tout à fait une autre ?) fait vite long feu. Et le dénouement, dont je lis dans Le Monde qu’il serait « bouleversant » ne m’a pas touché.

La bande-annonce

Le Concours ★★★☆

La documentariste Claire Simon, l’auteur de « Le Bois dont les rêves sont faits », a filmé le concours d’entrée de la Femis. Les épreuves écrites dans un immense amphithéâtre de Nanterre où plus de mille candidats doivent, en trois heures, analyser une séquence du film « Shokuzai » de Kiyoshi Kurosawa. Puis les oraux organisés en plusieurs sections (réalisation, scénario, décor, exploitation…) et en plusieurs phases (une épreuve pratique, un grand oral…)

Je pensais que « Le Concours » serait un documentaire sur la Femis, la plus prestigieuse école de cinéma française. Je me trompais en partie. Sans doute présente-t-il des réalisateurs et des scénaristes en herbe, pleins d’ambition et de maladresse, et nous renseigne-t-il sur la façon dont ils sont sélectionnés.

Mais « Le Concours » est plus largement, comme son titre l’annonce, un documentaire sur ce qu’on croit être à tort être une spécificité française alors qu’il est monnaie courante au Royaume-Uni ou aux États-Unis : le concours, mode de sélection méritocratique de nos élites. Un dossier de présentation et une épreuve écrite pour établir le potentiel créatif du candidat, tester sa culture générale et ainsi distinguer le bon grain de l’ivraie. Des oraux dits « techniques ». Puis un grand oral pour mesurer la motivation du candidat. Le principe vaut à la Femis. Il vaut, à quelques variantes près, pour toutes les grandes écoles : l’ENA, les écoles de commerce, Sciences Po…

Claire Simon nous montre des scènes qui sont traditionnellement couvertes par la confidentialité des délibérations. Dès que se termine la présentation plus ou moins convaincante du candidat, le jury délibère à huis clos sous l’œil de la caméra qui enregistre les commentaires peu amènes qui sont échangés sur sa prestation. On découvre alors de façon éclatante la part de subjectivité qui existe dans ces délibérés. Tel membre défend tel candidat (son « chouchou » selon l’expression d’un juré), avec parfois une mauvaise foi désarmante, parce qu’il l’a touché ou convaincu. Tel autre ne partage pas cette opinion et, avec une mauvaise foi au moins équivalente, retournant parfois les critères pour lesquels il avait pris la défense d’un candidat précédent, il essaie de modérer l’enthousiasme de son collègue.

Se révèle ainsi la schizophrénie de ces jurys d’examen. Ils exigent des candidats qu’ils fassent preuve d’originalité, se déclarent fatigués de prestations trop normées… et n’ont jamais autant de mal à se décider que face à des candidats hétérodoxes, originaux, hors norme dont ils saluent sans doute l’énergie mais qu’ils refusent de recruter de peur qu’ils ne trouvent pas leur place dans l’école. Pire : ils en viennent souvent à instaurer inconsciemment une nouvelle norme hétérodoxe et hors normes – que les candidats, plus malins qu’on ne l’imagine, ont tôt fait de cerner et dans le moule de laquelle ils se fondent. A la fin des fins, les recrutements s’opèrent selon un principe simple : les jurys apprécient les candidats qui leur ressemblent, auxquels ils s’identifient, qu’ils auraient aimé être à l’âge où eux-mêmes passaient déjà ce même concours.

Faut-il pour autant renoncer à la sélection et à ce mode de sélection-là ? Non. Mais à condition d’avoir conscience de ses biais et à condition de constituer les jurys de telle façon qu’ils reflètent les profils des candidats souhaités.

La bande-annonce

La Grande muraille ★☆☆☆

Deux mercenaires à la recherche du secret de la poudre noire arrivent sur la Grande muraille de Chine au moment où celle-ci reçoit l’assaut d’une horde de bêtes monstrueuses.

« La Grande muraille » est un drôle de mélange. Mélange de genres : comme si la bataille du gouffre de Helm du « Seigneur des Anneaux » se déroulait au pied du Mur du Nord de « Game of Thrones ». Mélange des cultures : si le rôle principal est tenu par la star hollywoodienne Matt Damon, si on aperçoit Pedro Pascal (pour séduire le public latino ?) et Willem Dafoe, les autres personnages sont tous chinois et le film reprend quelques uns des codes des wu xia pan, les films de sabre chinois.

« La Grande muraille » est particulièrement intéressant du point de vue géopolitique à l’heure où on s’interroge sur la capacité de la Chine, super-puissance en devenir, à se doter des atouts du « soft power ». Ce film constitue une tentative du cinéma chinois de partir à la conquête du box-office mondial. Pékin n’a pas lésiné sur les moyens en réalisant la superproduction la plus coûteuse jamais tournée sur le sol chinois.

Son arrière-plan idéologique est double. Premièrement la mythification de la Grande muraille, une attraction touristique dont la renommée repose sur un double mensonge : elle n’a jamais protégée la Chine des invasions barbares … et elle n’est pas visible de l’espace. Mais le mythe de la Grande Muraille permet d’exalter l’esprit de sacrifice des guerriers chinois prêts à donner leur vie pour défendre la mère patrie – tandis que les mercenaires occidentaux vendraient leur mère pour un sac d’or. Deuxièmement, une main tendue vers les Etats-Unis, conforme à l’idéologie de l’émergence pacifique (Zhonghuo heping jueqi) prônée par Hu Jintao et par son successeur. L’histoire de « La Grande muraille » est celle de la rencontre d’un mercenaire anglais (sic !) et d’une guerrière chinoise que tout semble a priori opposer mais qui, face à un ennemi commun, uniront leur force – à défaut de faire sauvagement l’amour car le film est évidemment classé G.

Et le cinéma dans tout ça ? « La Grande muraille » est un blockbuster insipide, anormalement court (1h44 seulement), sans l’humour irrévérencieux, qui émaille désormais les productions américaines mais auquel le public chinois semble encore trop allergique, et avec une tonne de lézards baveux grossièrement dessinés à la palette graphique. Si Matt Damon a l’air de s’ennuyer ferme, la révélation Jing Tian en revanche crève l’écran.

La bande-annonce

La Femme qui est partie ★★☆☆

Horacia vient de passer trente ans en prison pour un crime qu’elle n’a pas commis. Pendant sa captivité, son mari est décédé, son fils a disparu, sa fille s’est éloignée d’elle. Horacia décide de se venger de l’homme à l’origine de son incarcération.

Dostoïevski aux Philippines. « La Femme qui est partie » emprunte moins au Monte Cristo de Dumas qu’au Raskolnikov de Dostoïevski. Contrairement au résumé que je viens d’en faire, il y est moins question de vengeance que de rédemption. Car le lumineux personnage de Horacia ne va pas assouvir une froide vengeance. Elle se laisse distraire de son dessein par ses rencontres : un marchand bossu, un travesti épileptique et une mendiante timbrée. Jusqu’à un dénouement final aussi logique que surprenant.

Ce dénouement, il faut l’attendre trois heures quarante cinq. Pour l’auteur de « Death of the land of encantos », une œuvre de neuf heures, « La Femme… » a des allures de moyen métrage. Mais pour le spectateur normalement constitué, il constitue une véritable épreuve. On veut bien accepter que cette dilatation du temps, cette succession de longs plans fixes impeccablement organisés et subliment éclairés dans un noir et blanc poétique visent à mieux nous immerger dans l’histoire de Horacia. Mais on ne peut s’empêcher de penser que la même histoire aurait pu être racontée en deux heures de moins sans que sa force en soit diminuée.

La bande-annonce

Jackie ★☆☆☆

On a tous en mémoire quelques images de Jackie Kennedy en novembre 1963 : tentant de s’extraire de la Lincoln Continental décapotable où son mari vient d’être abattu à Dallas, hagarde derrière Lyndon Johnson au moment où il prête serment dans l’avion qui les ramène à Washington, entourée de ses enfants lors des funérailles du président assassiné.
Ce sont ces scènes que Pablo Larrain reconstitue – y intercalant quelques documents d’archives – dans un biopic qui n’en est pas un. « Jackie » n’évoque ni la jeunesse de Jacqueline Bouvier (1929-1994) ni son remariage avec le riche armateur grec Aristote Onassis mais se concentre sur les quelques jours qui suivent l’assassinat de JFK.

Condensé dans le temps, son propos n’en est pas moins ambitieux. Il veut montrer comment la First Lady fut la première à mettre en scène la Maison-Blanche. Du vivant de son mari : en y autorisant les journalistes. Après sa mort : en organisant ses funérailles comme un show médiatique.

Le sujet ne serait pas dépourvu d’intérêt s’il ne reposait pas sur une contradiction qui en sape la crédibilité. Pablo Larrain entend en effet faire de Jackie Kennedy à la fois une veuve dévorée par le chagrin et une femme politique d’une machiavélique duplicité. Le problème est que Natalie Portman, toujours excellente, est restée au plus près de son modèle et que Jacqueline Bouvier n’était rien d’autre qu’une fille de bonne famille, écrasée par ses responsabilités et dévastée par le soudain déclassement que la disparition de son mari allait inévitablement entraîner.
Lorsqu’elle fait visiter aux journalistes de CBS la Maison-Blanche, le sourire crispé, les bras ridiculement ballants, tentant de revêtir le costume trop grand pour elle de parfaite maitresse de maison, récitant des anecdotes prémâchées sur les lieux, elle ressemble plus à Lady Di qu’à Clare Underwood.

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Sourires d’une nuit d’été ★★★☆

L’intrigue de ce vaudeville, inspiré de Shakespeare, de Beaumarchais et de Marivaux, est passablement complexe. Il se déroule dans les années 1900 en Suède. Frederik, un avocat veuf, d’âge mûr, est remarié avec Anne, une très jeune femme. Henrik, le fils qu’il a eu de sa première épouse, en est amoureux. Lui-même a une maîtresse, Désirée (la bien-nommée), une actrice de théâtre, laquelle est entretenue par un aristocrate, le comte Malcom, que l’épouse essaie vainement de reconquérir. L’ensemble de ces personnages se retrouvent la nuit de la Saint-Jean dans le château de la mère de Désirée.

Sélectionné au Festival de Cannes de 1956, Sourires d’une nuit d’été est le film qui a révélé Ingmar Bergman à la presse et au public international. Mais ce n’est pas un film représentatif de l’œuvre de l’austère réalisateur suédois qui, sans aller jusqu’à le renier, en a toujours minoré l’importance.

Sourires d’une nuit d’été n’est pas sans rappeler La règle du jeu de Renoir – Bergman admirait le cinéma français de Carmé, Duvivier, Renoir. Il en a la finesse, la légèreté, l’humour. Les personnages masculins sont interprétés avec un formalisme empesé par la fine fleur de l’Académie royale de Suède. Les rôles féminins sont jouées par des actrices hors pair, Eva Dahlbeck « le porte-étendard de la féminité triomphante » selon l’expression de Bergman.

Après ce succès, Bergman tournait Le Septième sceau puis Les Fraises sauvages. Son cinéma prenait un tour radical. Pour le meilleur et pour le pire.

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Un jour dans la vie de Billy Lynn ★☆☆☆

Billy Lynn et son unité d’infanterie connaissent une soudaine gloire médiatique pour avoir survécu à une embuscade en Irak. Au Texas, en 2004, ils sont invités à parader lors de la finale du Super Bowl.

Le film d’Ang Lee repose sur un malentendu. Son intérêt revendiqué provient essentiellement de la technologie ultra-moderne qu’il utilise : une prise de vue à cent-vingt images par seconde qui lui donne, dit-on, un effet de réalité saisissant. Le problème est que les cinémas qui sont équipés d’une telle technologie se comptent sur les doigts de la main et que le film est diffusé au format classique de vingt-quatre images par seconde. En le voyant dans ce format, on sent confusément, dans certains plans, le parti que le réalisateur a entendu tirer de cette technologie ; mais faute de bénéficier de toutes ses potentialités, on ne peut guère y être sensible.

Privé de sa forme novatrice, « Un jour dans la vie de Billy Lynn » se réduit à ce qu’il est : un film sur les Etats-Unis et ses vétérans. Le sujet n’est pas nouveau. Depuis « Voyage au bout de l’enfer » ou « Rambo » jusqu’à « Démineurs » ou « American sniper », le vétéran de retour du champ de bataille est une figure omniprésente du cinéma américain – alors bizarrement que je serais bien en peine de citer un seul film français dont il soit le héros.

Du coup, le film d’Ang Lee souffre de la comparaison avec ses illustres prédécesseurs. Les thèmes qu’il évoque – le décalage entre le champ de bataille et le foyer retrouvé, le sentiment d’absurdité que la vie civile, si frivole, inspire – ont été trop rabâchés pour susciter l’intérêt. Et le charme des jeunes acteurs (Joe Alwyn dont c’est le premier rôle, Kristen Stewart, moins catatonique que dans le dernier Assayas) ne suffit pas à sortir ce film du lot.

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