Six Jours ★☆☆☆

Un inspecteur de police lillois (Sami Bouajila) ne se remet pas d’une affaire dont il a eu la responsabilité dix ans plus tôt et dont les faits seront prescrits dans six jours à peine. Une fillette avait été kidnappée. Elle était morte dans les bras de sa mère (Julie Gayet) et le ravisseur avait réussi à s’enfuir avec la rançon au nez et à la barbe de l’inspecteur chargé de l’arrêter.

J’ai pris devant Six jours le même plaisir et ai éprouvé la même déception qu’à la lecture d’un (mauvais) polar. Certes je n’ai pas regardé ma montre – comme on tourne les pages d’un polar en perdant la notion du temps – tout entier happé par la résolution d’un mystère qui révèle progressivement son double fond. Mais j’ai trouvé ce film d’une grande banalité, son scénario lesté de rebondissements extravagants, son casting rempli de gloires recyclées, son image grise et laide. J’ai cru un temps m’être égaré devant une publicité sponsorisée par Lille métropole. J’ai failli crier au plagiat devant son affiche et devant l’une de ses scènes principales pompées du chinois Une pluie sans fin.

La bande-annonce

Quiet Life ★★★☆

Après avoir été agressé par la police en Russie, Sergueï a fui son pays pour la Suède avec sa famille. Il y a déposé une demande d’asile qui lui est refusée. Au lendemain de ce refus traumatisant, sa fille cadette, Katja, qui fut témoin de l’agression de son père et dont le témoignage lui permettrait peut-être d’obtenir le titre de réfugié, tombe dans un coma profond. Elle est victime d’un mal fréquent chez les réfugiés et leurs enfants : le syndrome de résignation.

Quiet Life n’est pas un documentaire même si les faits qui l’inspirent ont été médicalement documentés en Suède. C’est une fiction qui fait un pari radical, similaire à celui du film tunisien La Source ou au Nosferatu de Robert Eggers, avec lesquels j’ai eu la dent (trop ?) dure ces jours derniers : celui de l’hyperstylisation.

Quiet Life tangente la dystopie. La froideur glaciale doublée du respect scrupuleux des droits humains avec laquelle les demandes d’asile sont traitées en Suède pourrait ressembler à ce qu’on voit dans le film mais s’en distingue néanmoins. Les réfugiés n’y sont pas accueillis dans des appartements aussi confortables (et c’est dommage) ; ils ne sont pas soumis à un stage aussi débilitant si leurs enfants sont hospitalisés (et c’est tant mieux). Mais comme dans toutes les dystopies réussies (on pense à Orange mécanique ou à Bienvenue à Gattaca), Quiet Life exagère certains traits de nos sociétés contemporaines pour en interroger les ressorts.

Comment traiter les demandeurs d’asile ? Quelles preuves leur demander pour attester des persécutions qu’ils prétendent avoir subies dans leur pays d’origine ? En demander trop, c’est courir le risque de refouler des réfugiés authentiquement persécutés ; en demander trop peu et se fier à leur seule parole, c’est courir celui d’accorder le titre de réfugié à des personnes qui n’y ont pas droit. Quel statut octroyer aux enfants des demandeurs d’asile ? Leur témoignage est-il recevable à l’appui de la demande déposée par leurs parents ? Peut-on les en séparer, dans quelles circonstances et à quelles conditions ? Leur état de santé peut-il faire obstacle à leur reconduite et à celle de leurs parents ?

Autant de questions juridiques et éthiques passionnantes que pose Quiet Life. Il le fait avec une froideur glaçante, à rebours du mélodrame. Son scénario, remarquablement écrit, distille son lot de rebondissements. Ses acteurs, dont Chulpan Khamatova qui a fui la Russie au lendemain de l’invasion de l’Ukraine en 2022 et s’est réfugié en Lettonie, sont parfaits.

Sur le même sujet, L’Histoire de Souleymane, l’un de mes films préférés de 2024, optait pour un parti bien différent : celui du naturalisme. Les deux films contiennent une scène quasiment identique : celle d’un témoignage, fébrilement préparé mais que le spectateur sait mensonger, devant un fonctionnaire de l’immigration. Les bonnes écoles de cinéma auront sans aucun doute l’idée de montrer à leurs étudiants ces deux scènes et d’en analyser les points communs et les différences.

La bande-annonce

La Source ★☆☆☆

Deux frères tunisiens, Mehdi et Amine, partent s’enrôler en Syrie dans les rangs de Daech. Leurs parents, Aicha et Brahim, de modestes pêcheurs, en sont désespérés. Quelque temps plus tard, Mehdi revient sans son frère. Une mystérieuse jeune femme, Reem, entièrement voilée, l’accompagne. Aicha décide de les cacher de la police qui pourrait les arrêter.

Deux films tunisiens récents ont évoqué le départ en Syrie de jeunes recrues et le vide qu’il laissait chez leurs parents, rongés par la culpabilité : Mon cher enfant et Les Filles d’Olfa. J’espérais que ce troisième soit aussi percutant que les deux premiers. Sa bande-annonce m’avait intrigué. J’ai hélas été fort déçu.

La jeune réalisatrice Meryam Joobeur, dont c’est le premier long, prend le parti de la stylisation. Stylisation de l’image, avec une palette de couleurs froides (on se croirait plus sur une lande bretonne que sur les rivages de la Méditerranée) brutalement illuminées par le fuchsia des vêtures. Avec une caméra qui filme les personnages au plus près, laissant les arrière-plans dans le flou. Stylisation d’un récit dont on comprend (mais suis-je sûr d’avoir bien compris ?) qu’il emprunte plus au conte voire au récit fantastique qu’au documentaire ou au thriller comme son résumé  le laissait à tort augurer.

Le problème de ces partis pris, de cette caméra myope, de ce récit à trous, est qu’ils laissent bien des zones d’ombre. On me rétorquera qu’il ne s’agit pas nécessairement d’un défaut. Dont acte. Pour autant ici, après une moitié de film où l’on accepte de se laisser envoûter, le pacte implicite noué entre le spectateur et le réalisateur se dissout progressivement. Quand l’intrigue se dénoue, quand on comprend qui est Reem et comment sont morts les disparus qui mettent au défi Bilal le policier (on reconnaît Adam Bessa, premier rôle des Fantômes et de Harka), près de deux heures se sont écoulées et la patience du spectateur est à bout.

La bande-annonce

Un ours dans le Jura ★★★☆

Michel (Franck Dubosc) et Cathy (Laure Calamy) exploitent bon an mal an une sapinière dans une forêt reculée du Jura avec leur fils Doudou (Timéo Mahaut, l’autre révélation des Pires). Alors que jamais on n’en avait croisé dans ce massif, un ours provoque un accident de la circulation. Michel en sort indemne ; mais les deux passagers d’une BMW sont tués. Le coffre de leur berline contient un sac de voyage rempli de billets de banque. Michel et Cathy, en indélicatesse avec leurs créanciers, décident de s’approprier le pactole à sept chiffres.

Franck Dubosc change de registre. L’humoriste, tête d’affiche de Camping 1, 2 et 3, opte pour sa troisième réalisation pour la comédie noire façon Fargo. S’il joue l’un des rôles principaux, il sait s’effacer derrière ses partenaires et joue avec une retenue à laquelle ses rôles de macho bronzé en maillot de bain ne nous avaient pas habitués.

L’histoire est réjouissante à condition d’accepter son manque de crédibilité. Si le film dure près de deux heures, on ne regarde pas sa montre une seule fois. Mais ses péripéties (trop ?) nombreuses ne sont pas le principal atout du film. Elles ne sont, comme dans Fargo, qu’un prétexte pour mettre en scène des personnages dont la balourdise apparente cache plus de finesse qu’on ne le pensait.

À ce titre, c’est Benoît Poelvoorde qui tire le mieux son épingle du jeu. Dans le rôle d’un major de gendarmerie en pleine déconfiture (sa femme l’a quitté pour son dentiste et sa fille, en année de césure après le bac, fait son désespoir), c’est à lui qu’incombe de mener l’enquête sur les cadavres qui s’accumulent – au point, dit-il malicieusement, qu’on en comptera bientôt plus que d’habitants dans cette petite commune du Haut-Jura. Laure Calamy, qu’on a beaucoup vue au risque de se huppertiser (et qu’on a vue pas plus tard que la semaine dernière dans Mon inséparable), est un diapason en-dessous. Ses meilleures répliques se trouvent quasiment toutes dans la bande-annonce.

Délicieusement amoral, plein de rebondissements, Un ours dans le Jura tient ses promesses : des acteurs bien dirigés (un coup de chapeau à Joséphine de Meaux en gendarmette empathique), des paysages enneigés, un suspens prenant, des situations désopilantes… Un cocktail réussi pour bien commencer l’année !
[En revanche, cette critique est écrite avec les pieds : il me faut un litre de café et deux Advil pour commencer l’année d’un bon pied]

La bande-annonce

Nosferatu ☆☆☆☆

La jeune Ellen (Lily-Rose Depp) est hantée depuis son plus jeune âge par des cauchemars. Son époux, Thomas (Nicholas Hoult), travaille à Wisborg en Allemagne dans une étude de notaire. Il a été missionné en Transylvanie par son employeur pour en ramener le comte Orlock, un riche propriétaire terrien qui souhaite faire l’acquisition d’une belle demeure. Le vieil homme, à la table duquel Thomas est convié au terme d’un long voyage, se révèle être un vampire qui a passé un pacte de sang avec Ellen dont il hante les nuits. Thomas parvient de justesse à lui échapper mais Orlock réussit à embarquer à bord d’un navire qui fait voile vers Wisborg.

Fort de la célébrité que lui ont value ses précédents films (The Lighthouse, The Nothman), Robert Eggers s’attaque à l’un des films les plus mythiques du cinéma. Nosferatu le vampire de F.W. Murnau a créé en 1922 un genre appelé à un succès immense : le film d’horreur (les puristes objecteront, et ils auront raison, que Méliès en signa le tout premier dès 1896, Le Manoir du diable). Il s’agissait de l’adaptation du roman de Bram Stoker Dracula, dont le studio de Murnau n’avait pas eu les moyens d’acheter les droits.

Roberte Eggers a quasiment tout gardé du film de Murnau : le nom des personnages, l’intrigue et son dénouement. Cette fidélité à l’original interroge. Pourquoi un cinéaste réalise-t-il, sans rien y apporter de nouveau, le remake d’un grand film indépassable ? Ne sait-il pas son entreprise condamnée par avance ? Les plus grands pourtant s’y sont aventurés sans succès : Gus van Sant avec Psycho, Steven Spielberg avec West Side Story.

Le film de Murnau, muet et en noir et blanc, a plus de cent ans. Celui de Robert Eggers peut raconter la même histoire autrement, avec des techniques beaucoup plus sophistiquées. Il ne s’en prive pas. À condition de ne pas être allergique aux jump scares et aux coups de cymbales, son Nosferatu est un émerveillement pour l’oeil. Il contient sans doute quelques-uns des plans les plus beaux qu’il ait été donné de voir dans cette année qui s’achève.  Mais – et c’est à mes yeux le second défaut rédhibitoire de ce film – il se réduit vite à cela : une surenchère de plans tous plus parfaits les uns que les autres mais qui, mis bout à bout, ne font guère de sens.

Pourtant, la figure du vampire ouvre à des questionnements angoissants : la vie après la mort, le sang et sa transmission, la relation au corps, la sexualité et sa découverte (qu’on songe au succès planétaire de Twilight). Ces thèmes sont ici à peine ébauchés. Tout se passe comme si – et c’est là que ma seconde critique rejoint la première – prisonnier d’une « sur-esthétisation maniaque » (l’expression est de Mathieu Macheret dans Le Monde), Eggers s’en était remis à Murnau pour raconter une histoire dont il se désintéresse.

La bande-annonce

Une langue universelle ★☆☆☆

Matthew, la quarantaine, quitte Montréal pour revenir à Winnipeg sa ville natale après la mort de son père pour s’occuper de sa mère vieillissante. Il y découvre une ville métamorphosée où l’anglais a été remplacé par le farsi. Son chemin croise celui de Massoud, un guide touristique, et de deux jeunes sœurs qui ont découvert un billet prisonnier d’un bloc de glace.

Jetez un oeil à la bande annonce de ce film hors normes, qui représentera le Canada à la prochaine cérémonie des Oscars (où il aura fort à faire face à Emilia PerezFlow ou Les Graines du figuier sauvage). C’est un croisement étrange entre Jacques Tati, Wes Anderson, Roy Andersson, Abbas Kiarostami et Guy Maddin – l’autre cinéaste de Winnipeg et figure tutélaire du cinéma canadien.

Matthew Rankin filme une ville sans charme sous la neige, pour laquelle néanmoins il a la tendresse qu’on porte à sa ville natale. Sa caméra est statique et son film organisé en longs plans immobiles, dépourvus de lignes d’horizon, enfermant ses personnages dans des cadres dont ils semblent condamnés à ne pas sortir. Le tout baigne dans une ambiance loufoque sinon absurde dont on ne sait que penser : le farsi est devenu la langue véhiculaire de Winnipeg sans qu’on sache pourquoi, les dindes y sont l’animal domestique le plus familier, en lieu et place des chats et des chiens.

Le résultat est déconcertant. On pourra s’y laisser prendre, à condition d’aimer être surpris et de lâcher prise. On pourra tout au contraire n’y pas adhérer et considérer, comme l’écrit excellement Clarisse Fabre dans Le Monde, que ce film fait trop d’effort à « décréter le bizarre » pour être totalement convaincant.

La bande-annonce

Crossing Istanbul ★★☆☆

Lia, une enseignante géorgienne à la retraite, entend bien respecter la promesse faite à sa sœur sur son lit de mort : aller retrouver à Istanbul son neveu transsexuel qui avait fui Batoumi et l’homophobie de sa famille. Commence pour Lia, accompagnée d’Achi, un jeune Géorgien en quête d’aventures qui lui propose de la guider, et bientôt rejointe par Evrim, une avocate transsexuelle, une longue (en)quête dans la mégalopole turque.

En regardant Crossing Istanbul, deux références me sont venues à l’esprit. La première, De l’autre côté, le film du réalisateur germano-turc Fatih Akin qui racontait le destin entrecroisé de plusieurs femmes à Istanbul, prix du meilleur scénario à Cannes en 2007. La seconde, le livre Le Sillon, prix Renaudot 2018, qui décrivait la vie à Istanbul au lendemain du durcissement du régime Erdogan après le coup d’État manqué de juillet 2016.

Ces deux références sont écrasantes. Car De l’autre côté et Le Sillon étaient, chacun à leur façon, des œuvres exceptionnelles. Crossing Istanbul ne pouvait être qu’un cran en-dessous. On y voit Istanbul, ses chats, le Bosphore. On évite Sainte Sophie – que les distributeurs ont cru bon d’ajouter sur l’affiche dans un photomontage malheureux – mais on reconnaît la cour intérieure de la Mosquée bleue. On découvre aussi les bas-fonds de cette cité interlope, ses transsexuels de toutes origines qui vivent de la prostitution en marge de la société.

Crossing Istanbul n’évite pas les lieux communs : Lia abandonne ses préjugés et desserre un peu l’étau dans lequel elle s’était jusqu’alors condamnée à vivre, Achi prend sa vie en main, Evrim s’obstine malgré tous les obstacles à défendre la cause des LGBT et de l’enfance maltraitée. Crossing Istanbul ne révolutionne pas le cinéma, mais nous offre un bon moment de cinéma.

La bande-annonce

Noël à Miller’s Point ★☆☆☆

Dans une grande maison de Long Island, trois (ou quatre ?) générations d’une famille italo-américaine se réunissent pour le réveillon de Noël.

J’avais déjà été passablement déconcerté, pour dire le moins, par le précédent film de Tyler Taormina, Ham on Rye. Je ne serais pas allé voir celui-ci si je n’en avais lu d’excellentes critiques. Elles saluaient la capacité du réalisateur à recréer l’atmosphère unique de ces joyeuses réunions, de ces tablées bruyantes que nous avons tous connues si nous avons eu la chance d’appartenir à une grande famille, de leurs éclats de rires, de leurs apartés, de leurs temps morts aussi et de leurs silences embarrassés. Les critiques évoquaient un récit nostalgique, élégiaque, émaillé d’accents joyciens ou proustiens.

On imagine volontiers que le réalisateur, né en 1990, a puisé dans ses souvenirs personnels. D’ailleurs, l’action se situe quelque part au début des années 2000, avec des téléphones portables à touches. Dans ce genre de films, la musique joue souvent un rôle essentiel ; elle est étonnamment absente ici.

Noël à Miller’s Point est un film choral minimaliste. On y voit défiler une galerie de personnages. Aucun n’est principal, aucun n’est secondaire. La « star » Michael Serra, co-producteur du film, a la modestie de tenir le rôle quasi muet d’un flic en patrouille. Le problème de cette construction est qu’on ne s’attache à rien : sitôt qu’un nouveau personnage est introduit, sitôt on s’en détache pour passer à un autre.

Pendant tout le film, j’ai attendu un drame qui ne venait pas : la dispute homérique qui mettrait les oncles aux mains ? la crise cardiaque qui terrasserait l’aïeule ? l’accident de voiture qui faucherait la vie des adolescents ? Mais rien ne vient dans Noël à Miller’s Point qui se tient à son strict cahier des charges. Je reprochais déjà ce manque d’ambition à Ham on Rye ; mais je reconnais volontiers que, paradoxalement, c’est ce minimalisme, ce don pour recoller de petits riens qui fait le prix du cinéma de Tyler Taormina.

La bande-annonce

100 000 000 000 000 – cent mille milliards ☆☆☆☆

Afine est escort à Monaco. Il partage une villa sur les hauts de Nice avec trois amies, escorts comme lui, qui partent à Dubaï passer les fêtes de Noël. Resté seul, Afine traîne son ennui dans les rues silencieuses de la principauté, éclairées par les illuminations de Noël. Une de ses clientes, une plantureuse sexagénaire, l’emmène faire des courses, manger une glace, se baigner dans sa piscine. Afine croise une amie serbe qui s’est vu confier par des parents milliardaires la garde de Julia, une enfant de douze ans à peine.

Virgil Vernier (Les Mercuriales, Sophia Antipolis) est un réalisateur français proche de Bertrand Mandico ou de Yann Gonzalez qui entend réinsuffler un peu de magie dans notre quotidien désenchanté. Il revendique une esthétique kitsch et queer.

Son troisième film – dont rien ne vient expliquer le titre – est un croisement improbable entre le documentaire et le conte. Documentaire : il se déroule dans la principauté monégasque dont le luxe ostentatoire et triste déborde dans les ruelles pendant les fêtes de fin d’année. Conte : les parents de Julia se font construire une île pour s’y réfugier après une catastrophe écologique mondiale imminente.

Au risque de me montrer bien dur, je ne trouve rien à sauver dans ce cinéma-là. Ni la pauvreté du jeu des acteurs, ni l’indigence du scénario, ni la laideur des images mal éclairées.

La bande-annonce

Au cœur des volcans : Requiem pour Katia et Maurice Krafft ★★☆☆

Maurice et Katia Krafft étaient deux volcanologues français qui, défiant la mort et finalement y succombant en juin 1991 sur les pentes du mont Unzen au Japon, ont filmé et photographié au péril de leur vie les plus spectaculaires éruptions volcaniques sur la planète pendant vingt ans.

Deux documentaires leur ont été consacrés, bouclés quasiment au même moment en 2022. Le premier de Werner Herzog avait été diffusé sur Arte avant, bizarrement, de trouver le chemin des salles plus de deux années plus tard. Le second, Fire of Love de Sara Dosa, était lui sorti dans quelques salles parisiennes en octobre 2022. Je l’y avais vu et lui avais consacré une critique.

Celle que je m’apprête à faire du documentaire de Werner Herzog pourrait être copiée quasiment mot à mot de celle que je fis il y a deux ans du documentaire de Sara Dosa tant les deux films se ressemblent. La raison en est qu’ils utilisent le même fonds iconographique : les films en Super-8 tournés par Maurice Krafft – sa femme, Katia, étant en charge de la photo.

Les deux documentaires montrent les mêmes images hallucinantes de volcans déchaînés dégorgeant des coulées de lave bouillante ou des torrents de boue, en Islande, en Indonésie ou en Colombie. Elles montrent aussi la silhouette fragile de nos deux Rouletabille, pas particulièrement charpentés ni outillés pour de telles aventures. On a parfois un peu l’impression de voir le film des vacances tournés par de sympathiques cousins…

Le documentaire de Werner Herzog ne nous dit pas grand-chose de l’histoire de ce couple hors normes. Celui de Sara Dosa était plus pédagogique qui racontait leur formation à l’université de Strasbourg, elle en chimie, lui, de quatre ans son cadet, en géologie. Il expliquait également le financement de leurs expéditions, grâce à quelques rares sponsors et grâce surtout à la commercialisation de leurs livres et de leurs films.

Werner Herzog, que la majestueuse beauté de la terre en éruption a toujours fasciné (en 1976, il a filmé l’éruption du volcan de la Soufrière à la Guadeloupe), est plus sensible aux images tournées par Maurice Krafft qu’à l’histoire du couple. Il nous montre les plus impressionnantes. Et même si je les avais déjà vues dans le documentaire de Sara Dosa, je n’ai pas boudé mon plaisir de les voir une seconde fois. Il montre aussi comment, avec le temps et l’expérience, le regard de Maurice Krafft s’affine et se professionnalise.

La bande-annonce