In Jackson Heights ★☆☆☆

À quatre-vingts ans passés,  Frederick Wiseman est le plus grand documentariste contemporain. Il a créé un style documentaire qui s’est imposé comme une règle, au point parfois d’être érigé en dogme : pas de voix off, pas d’explication, pas d’interview,  pas de musique. Des images et du son bruts, captés sur le vif, au plus proche de la réalité.

Cette technique cinématographique, Wiseman la met au service d’un projet sociologique. Chacun de ses documentaires décrypte une institution : un hôpital (Near Death, 1989), un théâtre (La Comédie-Française, 1996), un centre d’accueil pour femmes battues (Domestic Violence, 2001), une université (At Berkeley, 2013), un musée (National Gallery, 2014)…

Comme son nom l’indique, In Jackson Heights ne décrit pas une institution, mais le quartier le plus cosmopolite de New York où coexistent des communautés du monde entier. En filmant les réunions des associations qui en forment le tissu social – commerçants menacés par la grande distribution, LGBT en butte à l’homophobie, « wetbacks » en mal d’intégration – Wiseman se fait l’hagiographe du melting-pot américain.

Son documentaire a trois défauts.  Le premier est le manque d’unité : autant l’exploration d’une institution telle que la National Gallery ou l’université de Berkeley avait sa cohérence, autant celle d’un quartier n’en a pas spontanément. Le deuxième est l’angélisme : à en croire Wiseman, le multiculturalisme américain ne connaît ni angles morts ni plages d’ombre. Le dernier est la longueur : les documentaires de Wiseman ont une durée hors norme (At Berkeley excédait les quatre heures, In Jackson Heights dépasse les trois) qui se justifie quand ils nous captivent mais est rédhibitoire dans le cas inverse.

La bande-annonce

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *