Walter ☆☆☆☆

Quatre kaïras et leur éducateur (sic) braquent un supermarché.
Mais ils se heurtent à Walter, un vigile pas commode.

Bienvenue à l’ère Youtube. Quelques ados qui se filment dans leur chambre accèdent parfois sur Youtube à une étonnante célébrité qui se chiffre en milliers, voire en centaine de milliers de likes. Il était hélas logique que le cinéma cherche à en tirer profit en leur proposant de passer devant la caméra. C’est ainsi que se monte Walter qui réunit les « Déguns » Karim Jebli et Nordine Salhi et Alexandre Antonio alias TonioLife.

Le résultat est affligeant. Walter est une comédie qui se voudrait drôle construite autour d’un scénario sans relief. S’il se bornait à ne pas nous faire rire, on en serait simplement navré. Mais, plus grave, ce film charrie un racisme ordinaire et une homophobie beauf qu’on n’imaginait plus de mise. Les jeunes « bras cassés » qui en sont les héros ont beau avoir leur stupidité comme excuse et leur célébrité sur Youtube pour caution, elles ne suffisent pas à les exonérer.

La bande-annonce

C’est ça l’amour ★★★☆

La quarantaine bien entamée, Mario (Bouli Lanners) vit seul avec ses deux filles. Sa femme vient de le quitter. Niki, l’aînée, qui fêtera bientôt ses dix-huit ans, supporte vaillamment la séparation. Frida, la cadette, la vit plus mal. Mais, de tous, c’est Mario qui est le plus désemparé.

Il y a cinq ans, Claire Buger avait réalisé avec Girl Party un premier long métrage bouleversant, l’histoire d’une prostituée vieillissante au crépuscule de sa vie. Elle confirme cette première réussite avec son deuxième film, toujours tourné à Forbach, sa ville natale, mais cette fois ci avec des comédiens professionnels au premier rang desquels Bouli Lanners.

Il est formidable dans le rôle de Mario, cet homme déboussolé par le départ de sa femme, ce père aimant, follement attaché à ses filles. Son amour est si grand qu’il manque basculer dans la folie, maintenant le film sur le fil d’une violence contenue prête à exploser. À la fois nounours et mastodonte, Bouli Lanners a le physique de l’emploi, incarnant à la fois la force et la faiblesse.

Le sujet du film est tristement banal. Il a été traité plus souvent qu’à son tour dans le cinéma, et en particulier dans le cinéma français. Qu’on pense par exemple récemment à Jusqu’à la garde ou à Nos batailles. Le premier racontait avec une glaçante efficacité le harcèlement moral et physique d’un homme sur son ex-femme. Le second – qui n’est pas sans présenter bien des points communs avec C’est ça l’amour – faisait le portrait d’un homme s’efforçant de reconstruire sa vie après la disparition de son épouse.

C’est ça l’amour ne se résume pas au seul personnage de Mario. Film polyphonique, il répond à la question qu’il pose (pourquoi l’absence d’un point d’interrogation à la fin du titre ?) à travers plusieurs personnages. Si on ne la voit guère, Armelle incarne en deux ou trois plans une femme fatiguée, qui aime toujours ses enfants mais ne supporte plus de vivre avec son mari. L’aînée, Nikki, est plus positive, dans ses relations avec ses parents comme avec son copain. La cadette, Frida, est la plus émouvante. Déboussolée par le départ de sa mère, l’adolescente rebelle exprime son désarroi en désobéissant à son père. Parce qu’une camarade de classe lui témoigne de l’amitié, elle se déclare homosexuelle.

La difficulté d’un tel scénario est de lui trouver une fin. C’est ça l’amour s’en était trouvé une, bouleversante, sur fond d’adagio du concerto pour piano de Mozart. Hélas, la réalisatrice a cru bon d’y rajouter une autre scène finale dont elle aurait pu se passer.

La bande-annonce

La Section Anderson ★★☆☆

1966. Le reporter de guerre Pierre Schoendoerffer est dépêché au Vietnam par Pierre Lazareff, le réalisateur de 5 colonnes à la Une, le magazine d’informations de l’ORTF. Le reporter de guerre qui avait combattu à Diên Biên Phu douze ans plus tôt et filmé La 317ème Section l’année précédente retourne en Indochine. Avec un caméraman et un preneur de sons, il est « embedded » pendant sept semaines dans une section de cavalerie héliportée.
La Section Anderson obtient l’Oscar du meilleur documentaire en 1968. Il était inédit en salles.

La Section Anderson donne une fallacieuse impression de déjà-vu. La vie au sein de la section rappelle Platoon. La musique diffusée par la radio militaire résonne avec Good Morning, Vietnam. Les ballets des hélicoptères ressemble à ceux de Apocalypse Now. Mais La Section Anderson est antérieure à tous ces films mythiques. En posant sa caméra au sein d’une section, Schoendoerffer crée sans le faire exprès l’iconographie qui inspirera tous les films sur la guerre du Vietnam des vingt années suivantes.

La Section Anderson filme sur le vif une guerre en train de se faire. Pas de grandes batailles, mais la vie quotidienne : les soldats lisent Mandrake, mangent, se douchent, partent en permission à Saïgon. On y voit des combattants, étonnamment jeunes – la moitié du contingent était composé d’appelés – dont le réalisateur égrène en voix off le nom, l’âge et l’origine géographique. Schoendoerffer écrira : « Je croyais retrouver l’Indochine, j’ai rencontré l’Amérique ». Une Amérique traversée par la question raciale : Joseph B. Anderson, qui dirige la section, est un officier noir fraîchement émoulu de West Point alors que les hommes sous ses ordres sont pour la plupart Blancs.

Filmé à l’ancienne, avec son noir et blanc et sa voix off, La Section Anderson  garde une étonnante modernité.

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Captive State ★☆☆☆

De mystérieux extra-terrestres ont envahi la planète. S’appuyant sur quelques collaborateurs, ils la gouvernent d’une main de fer. Mais la résistance s’organise.

S’il ne dispose ni du budget ni des têtes d’affiche de Hunger Games ou V pour Vendetta, Captive State a tout pour nous mettre en appétit : un univers dystopique totalitaire, des Aliens menaçants, des humains courageux… Thriller politique sur fond de science-fiction, Captive State fait l’éloge de la résistance civique face à un État totalitaire. Il a pour héros un jeune Noir (Ashton Sanders) dont la conscience s’éveille, un policier ambigu (John Goodman), une prostituée bibliophile (Vera Farmiga)…

Mais Captive State souffre d’un défaut de taille : son scénario est si complexe, son montage si confus qu’on n’y comprend goutte. À tête reposée, on réussit vaille que vaille à reconstituer la trame de l’histoire, au fond pas si compliquée voire franchement simpliste. Mais il est trop tard : peiner à comprendre un film dont on réalise finalement la vacuité n’est pas la meilleure recette pour séduire le spectateur.

La bande-annonce

Free Solo ★★★☆

L’escalade en solo intégral (« free solo ») est une technique d’alpinisme dans laquelle le grimpeur n’utilise aucune technique d’assurance.
Né en 1985, Axel Honnold est un des grimpeurs professionnels les plus célèbres au monde. Il a gravi en solo intégral plusieurs voies parmi les plus dangereuses au monde.
En 2017, il s’attaque à El Capitan dans le parc de Yosemite, une paroi verticale de neuf cent mètres de haut.
Jimmy Chin, un grimpeur professionnel lui aussi, le réalisateur de Meru, un documentaire Netflix, l’a filmé. Oscar 2019 du meilleur documentaire, diffusé sur National Geographic, il est inédit en salles.

Free Solo raconte une ascension époustouflante. Il le fait avec des images à couper le souffle. On imagine qu’elles ont été tournées par des drones avant d’apprendre qu’ils sont interdits dans le parc national de Yosemite. Ces images vertigineuses ont été tournées soit par des professionnels encordés, soit par des mini-caméras disséminées tout le long du parcours, soit par un hélicoptère à très haute altitude avec un zoom surpuissant.

Mais Free Solo n’est pas seulement l’histoire d’une ascension. C’est aussi le portrait d’un homme étonnant. Axel Honnold ne paie pas de mine. Il n’a pas la carrure d’un surhomme ou la musculature d’un bodybuilder. Sec comme une trique, il n’a pas non plus une technique qui défie les lois de la gravité, comme Patrick Edlinger, la star des années quatre vingts qui se suspendait aux parois verticales des calanques de Cassis par l’auriculaire.

Axel Honnold n’en est pas moins un homme hors du commun dont les ascensions trompe-la-mort nous laissent le souffle court et les mains moites. Un scanner révèle un complexe amygdalien original qui inhibe le circuit de la peur. Des tests de QI signalent une intelligence hors du commun qui lui permet une analyse fine du risque.
Le père d’Axel Honnold était, selon sa mère, affecté du syndrome d’Asperger. Axel lui-même était enfant d’une grande timidité. C’est cette timidité d’ailleurs qui l’a poussé très jeune vers la pratique solitaire de l’escalade.

La caméra, qui se fait indiscrète sans jamais être impudique, suit Axel dans sa vie quotidienne. Elle nous fait vivre au jour le jour sa vie de couple avec la charmante Sanni McCandless, une Californienne aussi belle que saine. Le couple est attendrissant : Axel est tout entier tendu vers la pratique de son art. Sanni l’adore et l’appuie. Mais cet amour le déconcentre autant qu’il l’épanouit.

On comprend à la fin de ce documentaire enthousiasmant que Axel Honnold aura révélé deux défis : la montagne et l’Autre.

La bande-annonce

Still recording ★☆☆☆

Saeed et Milad sont deux jeunes Syriens pris dans le feu de la guerre civile. L’un est en école d’ingénieur, l’autre aux Beaux-Arts. En 2011, ils décident de s’engager aux côtés des opposants au régime de Assad.
Still Recording raconte quatre années de leur vie dans la résistance.

La guerre civile filmée par ceux qui la font.
On se tromperait en allant voir Still Recording pour comprendre le conflit syrien. En refusant tout commentaire explicatif, toute voix off, les réalisateurs tournent ouvertement le dos à toute visée pédagogique. Il ne s’agit pas de nous faire comprendre les causes de ce conflit, son évolution. Tout au plus voit-on que les rebelles s’opposent au régime d’Assad ; tout au plus perçoit-on par quelques allusions sa dimension religieuse qui oppose la majorité sunnite à une minorité alaouite ; tout au plus mesure-t-on à voir survoler les Mig russes sa dimension internationale. Mais on n’en apprendra pas vraiment plus.

L’essentiel du film n’est pas là. Il est dans la tentative désespérée de nous faire vivre la guerre de l’intérieur. Faire la guerre ce n’est pas tant livrer des combats épiques comme on en voit dans les films. Lorsque les obus pleuvent, lorsque les balles filent, les documentaristes, même les plus intrépides, courent aux abris. Faire la guerre, c’est vivre dans des immeubles en ruine, dans des conditions spartiates. Faire la guerre, c’est attendre, s’ennuyer, passer le temps en jouant aux cartes ou en écoutant la radio. Et puis, c’est un jour, comme ce fut le cas de quatorze documentaristes décédés auxquels le générique de fin rend hommage, prendre une balle perdue comme le montre la dernière séquence du film – qui semble toutefois un peu trop « parfaite » pour ne pas laisser suspecter une reconstitution.

Il faut donc saluer l’ambition de ce documentaire et son refus de tout sensationnalisme. Là où n’importe quel documentaire aurait filmé en gros plan les corps décomposés par les bombes chimiques, Still Recording détourne pudiquement le regard. Il n’en reste pas moins que ce récit, qui s’étire pendant plus de deux heures interminables, ne nous tient pas en haleine. Comme Filles du feu, le documentaire de Stéphane Breton sur les combattantes kurdes contre l’État islamique (EI) sorti l’an passé, Still Recording filme la guerre jusqu’à l’ennui.

La bande-annonce

Qu’est ce qu’on a encore fait au bon Dieu ? ★☆☆☆

On avait laissé les époux Verneuil il y a cinq ans encaisser, non sans mal, l’annonce par leurs quatre filles de leurs mariages quasi-simultanés avec un Juif, un Arabe, un Noir et un Chinois. Qu’est ce qu’on a fait au bon Dieu ? a enregistré un tel succès (plus de douze millions d’entrées soit le troisième film français le plus populaire du siècle derrière Bienvenue chez les Ch’tis et Intouchables) que le tournage d’une suite s’imposait. L’entreprise n’était guère risquée et s’avère payante : le deuxième opus dépasse les six millions d’entrées et pourrait en engranger sept.

Le succès du premier volet reposait sur un cocktail éprouvé. Une comédie française portée par quelques acteurs reconnus enchaînant des situations cocasses. Un sujet d’actualité dans lequel tous les spectateurs, quels que soient l’âge ou le milieu, pourraient se reconnaître. Une conclusion à laquelle tous encore, de droite, de gauche ou d’ailleurs, pourraient adhérer : l’éloge du vivre-ensemble et des valeurs familiales.

Il n’y avait aucune raison d’ajouter à ce film une suite – si ce n’est celle d’exploiter la veine jusqu’à épuisement. La tâche des scénaristes n’était pas simple : il s’agissait d’écrire la même histoire pour ne pas dérouter les spectateurs sans écrire tout à fait la même pour ne pas leur donner trop ostensiblement l’impression d’être pris pour des poires. Après des séances de brainstorming qu’on imagine nombreuses et houleuses, ils ont accouché d’une histoire improbable : les gendres des Verneuil, fatigués des discriminations dont ils sont l’objet, décident de quitter la France. Sous la pression de sa femme, traumatisée par le départ de ses petits enfants, Claude Verneuil va tenter de leur faire renoncer à leurs expatriations. Ce seul ressort ne suffisant pas à faire un film, les scénaristes en ajoutent un autre : le mariage de Viviane Koffi – dont le père, Ivoirien bon teint, n’avait accepté qu’avec les plus extrêmes réserves l’union de son aîné avec une Blanche – avec… une femme.

Qu’est ce qu’on a encore fait au bon Dieu ? réussit à dire tout et son contraire. Il réussit tout à la fois à pointer les tares de la France (le racisme, les communautarismes et les embouteillages) et à en exalter les atouts (les Châteaux de la Loire, le bon vin et sa douceur de vivre). Cette schizophrénie n’est qu’apparente. Elle est au fond profondément en phase avec l’opinion publique contemporaine. La morale est empruntée à Sylvain Tesson, cité dans le texte : « La France est un paradis peuplé de gens qui se croient en enfer ».

Mais c’est bien là la seule qualité de ce film sans finesse. Chaque personnage se réduit à une caricature aussi simpliste que raciste : David le gendre juif est un entrepreneur raté, Chao le gendre chinois vit dans l’obsession des agressions dont les touristes asiatiques sont victimes… Tous les gags s’annoncent de si loin qu’ils peinent à arracher un sourire : ainsi du jardinier afghan qui porte une ceinture lombaire que Claude Verneuil suspectera de cacher des explosifs.

Éloge du vivre-ensemble et ode à la France éternelle, Qu’est ce qu’on a encore fait au bon Dieu ?, feel good movie revendiqué, voudrait faire rire la France des bobos et la France de l’apéro. Son succès au box office montre qu’il est en passe d’y parvenir. De là à les réconcilier…

La bande-annonce

Si Beale Street pouvait parler ★★★☆

Tish a dix-neuf ans, Fonny trois de plus. Amis depuis l’enfance, ils s’aiment d’un amour infini. Mais l’Amérique des années soixante-dix n’est pas douce aux Noirs. Fonny est emprisonné pour un viol qu’il n’a pas commis. Épaulée par ses parents et par sa sœur, Trish, qui attend un enfant, tente de l’innocenter.

Si Beale Street pouvait parler est réalisé par Barry Jenkins, auréolé du succès de son précédent film. Moonlight a un défaut rédhibitoire : il a usurpé, dans les conditions que l’on sait l’Oscar du Meilleur film 2017 à La La Land. Mais, cette réserve posée, Moonlight était l’œuvre d’un grand réalisateur dont on voit la marque dans son film suivant. On y retrouve le même esthétisme, les plans très rapprochés, presque caressants, la musique élégiaque, le soin apporté à la direction d’acteurs.

Si Beale Street… est l’adaptation d’un roman de James Baldwin. Robert Guédiguian s’en était déjà librement inspiré, transposant l’action de New York à Marseille. La vie et l’œuvre de James Baldwin ont connu, depuis la sortie de I am not your Negro de Raoul Peck en 2017, un regain de popularité. Son intarissable colère contre le sort de ses frères de couleur, son combat pour leur donner une voix (on parlerait en américain d’empowerment, expression que traduit mal le terme « émancipation ») percent dans ce roman dès son titre et dans l’adaptation qu’en fait Barry Jenkins. Les Blancs n’y ont pas le bon rôle : flic odieux, prédateur sexuel… seul le jeune avocat qui accepte d’assurer la défense de Fonny sauve la mise.

Mais on se tromperait à résumer ce film à un seul plaidoyer en faveur des Noirs. Si Beale Street… est plus que cela. C’est d’abord, c’est surtout le portrait lumineux d’un jeune couple fou d’amour. Ils s’aiment avec la légèreté de leurs vingt ans et la gravité de qui aime pour la première fois. Sans doute ce film a-t-il des longueurs et aurait-il pu être amputé d’une bonne demie-heure. Sans doute a-t-il une gravité qui vire parfois à l’ostentation. Il n’en conserve pas moins une beauté, une majesté qui forcent l’admiration.

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Colette ★★☆☆

Née en 1873 dans un petit village de Bourgogne, Gabrielle-Sidonie Colette rencontre encore adolescente Willy, un écrivain parisien à succès et un homme à femmes. Elle l’épouse à vingt ans à peine et s’installe avec lui à Paris. Pour soutenir un train de vie dispendieux, Willy fait travailler autour de lui plusieurs nègres qui rédigent des ouvrages qu’il signe de son nom. Il convainc son épouse de raconter ses souvenirs d’enfance. Claudine à l’école, publié sous le nom de Willy, connaît un succès retentissant qui appelle vite une suite.
Mais celle qui se fait désormais appeler Colette supporte de plus en plus mal son inconstant époux. Elle découvre son homosexualité avec Georgie Raoul-Duval (la « Rézi » des Claudine) puis avec Mathilde de Morny. Surtout, elle exige de son mari le droit de signer ses livres de son propre nom.

Encore un biopic. Après Oscar Wilde, après Cézanne, après Rodin, après Paula Modersohn-Becker, après Toulouse-Lautrec, voici un nouveau biopic ayant pour cadre le Paris de la Belle époque. Il raconte la libération d’une femme qui, à l’époque de #MeToo, se teinte d’un écho particulier : Colette revendique son droit à vivre librement sa (bi)sexualité et gagne celui de le faire hors de l’emprise d’un mari phallocrate et spoliateur dont elle divorcera en 1910 et dont elle récupèrera les droits qu’il s’était arrogés sur la série des Claudine.

La production est anglo-saxonne. Il faut lui reconnaître le mérite d’y avoir mis le budget nécessaire et un soin tout particulier dans les décors et dans les toilettes (je peine à me remettre de la façon dont la rousse Eleanor Tomlinson s’en dévêt). Le rôle principal est confié à Keira Knightley qui s’est fait une spécialité des films en costumes : Orgueil et préjugés, The Duchess, Anna Karenine… Elle joue excellemment. Là n’est pas le problème. Elle est ravissante. Trop peut-être. Car Colette n’était pas jolie. Colette n’était pas gracieuse. Colette était une fille de la campagne dont l’accent rocailleux faisait la risée des cercles parisiens où Willy l’introduisit. Yolande Moreau – dont l’interprétation de Séraphine lui a valu le César de la meilleure actrice en 2009 – aurait mieux convenu pour le rôle.

La bande-annonce

Le Mystère Henri Pick ★☆☆☆

À Crozon en Bretagne existe une bibliothèque des livres refusés qui rassemble des manuscrits recalés par les éditeurs. Une jeune directrice de collection parisienne (Alice Isaaz) y déniche un roman qu’elle fait publier et qui remporte un éclatant succès.
Mais le célèbre critique Jean-Michel Rouche (Fabrice Luchini) flaire la supercherie. Il ne croit pas que ce chef d’œuvre ait pu être écrit par Henri Pick, un pizzaiolo aujourd’hui décédé. Avec la complicité de sa fille, Joséphine Pick (Camille Cottin), il mène l’enquête.

Adapté d’un roman de David Foenkinos, un auteur à succès, Le Mystère Henri Pick rassemble tous les ingrédients du film à succès : un acteur (Fabrice Lucchini égal à lui même) qui sous son seul nom attire les séniors mieux qu’une liquidation de stock chez Damart, une actrice (Camille Cottin moins drole que dans les sketchs qui l’ont fait connaître) qui s’est désormais fait un nom, une intrigue policière, un film qui fait l’éloge de la lecture, bref l’assurance d’un spectacle agréable « sans sexe ni violence ».

Ce cahier des charges honnête à défaut d’être ambitieux est scrupuleusement rempli. Le Mystère Henri Pick ne réserve aucune mauvaise surprise. Aucune bonne non plus : les passages les plus drôles étaient déjà dans la bande annonce généreusement diffusée pendant tout le mois de février.

Ceux qui aiment Fabrice Luchini se régaleront. Ceux que son élocution pédante et son sourire arrêté exaspèrent n’iront pas voir ce film. Bref, tout le monde sera content.

La bande-annonce