
Eleanor (June Squibb) est nonagénaire. Elle vient de perdre Bessie, sa meilleure amie, avec laquelle elle coulait des jours heureux en Floride et décide de revenir vivre chez sa fille unique en pleine midlife crisis à New York. Elle s’y retrouve contre sa volonté dans un groupe de survivants de l’Holocauste à raconter une histoire qui n’est pas la sienne mais celle de Bessie. L’histoire émeut Nina (Erin Kellyman) une jeune étudiante en journalisme qui vient de perdre sa mère.
Eleanor the Great est le premier film de Scarlett Johansson. Il sort quelques semaines après celui de Kristen Stewart, The Chronology of Water. Les deux films des deux wonder kids hollywoodiennes n’auraient pas pu être plus différents. Autant celui de la star de Twilight est (trop) arty et veut à tout prix briller par son originalité, autant celui de la révélation de Lost in Translation est sage et académique.
Son sujet est un hommage à la grand-mère maternelle de la réalisatrice, juive ashkénaze d’origine polonaise. Une actrice nonagénaire en est en effet l’héroïne. Et on se demande, en en voyant le titre, l’affiche, le pitch, si son sujet, comme tant d’autres films en ont déjà parlé (À feu doux, Tout s’est bien passé, Falling, Supernova, The Father… ), ne racontera pas son lent déclin dans la maladie et ses répercussions sur ses proches. Mais son histoire ne prend pas cette direction-là et se concentre sur un épisode moins morbide : un mensonge qu’on pourrait considérer comme inexcusable mais dont le film choisit d’innocenter l’auteur et l’amitié qu’il fait naître entre deux femmes en deuil.
Car cette amitié à la Harold et Maude se construit autour d’un double deuil : l’amie de Bessie – dont je me suis demandé si, la cohabitation aidant, elle n’en était pas devenue l’amante cachée – et la mère de Nina sur la mort de laquelle son père (Chiwetel Ejiofor), pourtant journaliste à succès sur une chaîne de grande écoute, ne parvient pas à mettre de mots.
J’entends les critiques qui ont égratigné ce film, lui reprochant d’être trop lacrymal et de jouer sur une surabondance de bons sentiments. Cela ne m’a pas empêché d’être embarqué de bout en bout, séduit par l’ironie mordante des répliques d’Eleanor, bouleversé par le chagrin de Nina et par ses taches de rousseur, emporté par les rebondissements d’un scénario bien écrit même si des esprits chagrins pourraient lui reprocher de ne pas être crédible.








