L’Arme à gauche (1965) ★★★☆

Jacques Cournot (Lino Ventura) est un navigateur au long cours appelé à Saint-Domingue pour y expertiser un yacht, le Dragoon, avant son achat par un riche homme d’affaires dirigeant d’une société pharmaceutique. Il est en fait le dupe de trafiquants d’armes qui, une fois l’expertise réalisée, s’emparent du bateau et voguent vers l’Amérique du sud. Pour aider la propriétaire, Rae Osborne (Sylva Koscina), Cournot accepte de partir à la recherche du navire avec l’aide d’un de ses amis aviateurs. Il le retrouve échoué sur un banc de sable

En 1965, Claude Sautet se cherche encore. Il deviendra dix ans plus tard l’entomologiste des années Giscard, le peintre de la bourgeoisie française des années 70, avec ses chefs d’œuvre : César et Rosalie, Mado, Une histoire simple… Il fait ses premières armes dans le cinéma noir de série B, comme c’était la mode à l’époque.

L’Arme à gauche m’a fait penser à Plein Soleil de René Clément, adapté de Patricia Highsmith. La raison en est sans doute son cadre à la fois exotique et claustrophobe. Toute la seconde moitié de L’Arme à gauche se déroule en effet dans le Dragoon. J’ai pensé aussi à Calme blanc de Philip Noyce – qui révéla Nicole Kidman. Quelle ne fut ma surprise de découvrir que ces deux films étaient l’un comme l’autre des adaptations du même auteur de polar américain Charles Williams : Aground (1961) et Dead Calm (1963).

L’Arme à gauche est un film tout entier construit à la gloire de son acteur principal. Lino Ventura est en 1965 au sommet de sa gloire. Il vient de tourner Les Tontons flingueurs et Les Barbouzes. Il a quarante-six ans à peine et est encore dans la force de l’âge. Dans les rues moites de Saint-Domingue, il ne quitte jamais son élégant costume cravate. Il ne le quitte pas non plus quand il monte à bord du Dragoon. Tout au plus retire-t-il sa cravate et ses richelieus pour plonger. Il incarne une virilité brute et taiseuse qui était encore de rigueur à l’époque et qui a bien évolué, pour le meilleur ou pour le pire selon l’opinion qu’on s’en fait.

L’Arme à gauche n’est pas un chef d’œuvre inoubliable et n’avait aucune ambition à l’être. Mais c’est un excellent film dont toute la seconde partie réussit, avec une étonnante économie de moyens, à nous tenir en haleine.

La bande-annonce

My Stolen Planet ★★☆☆

Farahnaz Sharifi est née en 1979 en Iran au moment même de la chute du régime du Shah et de l’arrivée au pouvoir d’une théocratie autoritaire. Elle y a grandi, y a fait des études de cinéma et n’en est partie qu’en 2022 pour l’Allemagne dont elle n’est jamais revenue.  Obsédée par les images, elle en a collecté de toutes sortes, des photos, des films Super 8 tournés par des familles qui souvent ont pris le chemin de l’exil. Ces images, confisquées par la police et revendues à la sauvette, révèlent « l’autre planète » des Iraniens, celle qui leur a été dérobée et qu’ils habitaient en cachette, dans l’intimité de leurs foyers, loin du regard panoptique des pasdarans.

Son documentaire autobiographique instruit le procès du régime des mollahs et de l’oppression qu’il fait subir aux femmes, étouffées derrière leur tchador. Il évoque les figures courageuses de ce combat : celle oubliée de Homa Darabi, qui s’est immolée par le feu en 1994, après avoir déchiré le foulard qu’elle portait, et celle désormais mondialement connue de Mahsa Amini, dont la mort en septembre 2022, a lancé le mouvement « Femme, Vie, Liberté ».

Oscillant sans cesse entre le particulier et l’universel, entre l’histoire de sa vie privée et la condition féminine en Iran, My Stolen Planet est particulièrement convaincant. Il l’est autrement plus que Lire Lolita à Téhéran qui m’avait tellement déçu. L’accuserait-on d’être tendancieux, on verrait mal ce qu’il y a à dire pour défendre un régime qui bâillonne les femmes, qui appelle au crime, qui distille la haine et qui espérons-le, finira bien un jour par tomber.

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Germaine Acogny, l’essence de la danse ★☆☆☆

La danseuse Germaine Acogny a créé à Toubab Dialaw, sur la Petite Côte, à l’est de Dakar, un lieu unique, l’École des sables. Le documentaire très classique de l’Allemande Greta-Marie Becker nous en ouvre les portes.

Avec quelques images d’archives, il revient sur l’histoire de cette danseuse née au Bénin en 1944, élève de Béjart, qui administra pour lui dans les années 70 l’antenne africaine de son école de danse à Dakar avant de voler de ses propres ailes.

La documentariste a gagné la confiance de la danseuse qui lui a ouvert son intimité et lui a raconté le couple étonnant qu’elle forme avec Helmut Vogt, un architecte allemand qui a dressé les plans de l’École des sables.

Une structure est née, dans un site splendide. Des stages de danse y sont organisés, qui attirent des danseurs du continent africain et d’ailleurs. On aurait aimé en savoir plus sur leur organisation et sur le recrutement des danseurs. Ces stages sont-ils ouverts à tous ? ou bien ses participants sont-ils sélectionnés ? Qui les finance ? les danseurs ? leurs compagnies ? leurs pays ? les tarifs varient-ils selon que le stagiaire est africain ou pas ? Germaine Acogny dirige-t-elle une compagnie par ailleurs qui recruterait ses danseurs parmi ses anciens stagiaires ?

On est un peu frustré de ces questions sans réponse. On se console en regardant les danseurs s’exercer. On voit aussi quelques images des spectacles donnés par Germaine Acogny elle-même en solo ou avec ses danseurs, par exemple Le Sacre du printemps ou dans Fagaala sur le génocide au Rwanda.

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Last Stop: Yuma County ★★☆☆

Au milieu du désert, à la frontière de l’Arizona et de la Californie, se dresse une station-service adossée à un diner qui se vante de proposer une excellente tarte à la rhubarbe. C’est là que, piégés par une pompe vide et un camion citerne en retard, vont se retrouver des individus que rien a priori n’aurait dû conduire à se rencontrer : un VRP californien, une serveuse et un pompiste, deux malfrats en cavale, un couple de retraités texans, un jeune flic pas très fute-fute…

Dès la bande annonce, on sait sans risque d’erreur à quoi on aura à faire : un huis clos en temps quasi réel entre des personnages tous plus caricaturaux les uns que les autres dans une Amérique archétypale et sans âge (l’action pourrait tout aussi bien se dérouler dans les années 60, 70 ou 80).

Last Stop: Yuma County emprunte à d’innombrables films célèbres et ne s’en cache pas : Fargo, Pulp FictionBonnie and Clyde, La Balade sauvage, Apportez-moi la tête d’Alfredo Garcia…  Il offre au cinéphile le plaisir de (croire) retrouver ces clins d’œil à ces classiques ultra-référencés.

Le risque que court un tel film est de tomber dans la parodie ou dans le pâle remake. C’est d’ailleurs le reproche que lui font les critiques du Monde et de Télérama. J’aurais la dent moins dure en raison d’un scénario malin qui m’a tenu en haleine pendant toute la durée du film et qui m’a réservé de(ux) belles surprises que je ne peux qu’esquisser : l’une aux deux tiers du film que j’attendais beaucoup plus tard et l’autre dans son plan final.

Ce scénario à l’écriture ciselée relève un sacré défi : associer à chaque étape du film le spectateur aux choix, tous également calamiteux, qui s’ouvrent aux personnages. Il y faut du rythme – pour laisser au spectateur le temps de réfléchir – et de la pédagogie – pour lui présenter les alternatives possibles voire lui laisser en dessiner d’autres. Last Stop: Yuma County nous fait ce beau cadeau : celui de nous donner l’impression  que c’est nous, depuis notre siège, qui prenons le contrôle du film.

PS : La rhubarbe est-elle un légume ou un fruit ?

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Confidente ★☆☆☆

Sabiha travaille sous pseudonyme dans un call center érotique pour rassembler la somme qui lui permettra de payer l’avocat qui la défend dans le procès qui l’oppose à son mari pour la garde de leur fils. Elle fait mine de partager les fantasmes les plus débridés que ses clients, pervers refoulés, maris mal mariés, veufs inconsolables, lui débitent au téléphone. Nous sommes à Ankara en 1999 le soir où un terrible tremblement de terre va tuer des milliers de victimes dans le nord-ouest de la Turquie. Sabiha est en ligne avec un lycéen pris sous les décombres dans un quartier d’Istanbul. Elle a le moyen de le sauver en contactant le procureur d’Ankara…

Confidente vaut surtout par son dispositif qui rappelle celui du très réussi polar danois The Guilty qui se déroulait en temps réel dans un centre d’appel de la police. Comme dans The Guilty, le film se déroule dans un seul lieu clos. Le scénario évolue avec les différentes conversations téléphoniques que noue Sabiha, avec cet adolescent à moitié enseveli, avec le procureur d’Ankara, avec un parrain de la mafia…

Le pitch est alléchant. la première demi-heure tient ses promesses. Mais hélas, malgré le beau visage de Saadet Işıl Aksoy, le film – qui dure soixante-seize minutes à peine – se perd dans sa seconde partie dans des rebondissements médiocrement crédibles, jusqu’à un dénouement dispensable.

Dommage…

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Simone Barbès ou La Vertu (1979) ★☆☆☆

Simone Barbès (Ingrid Bourgoin) est ouvreuse dans un cinéma porno de la rue de la Gaîté, près de la gare Montparnasse, qui voit défiler une faune hétéroclite de vieux pervers, de messieurs distingués, de resquilleurs inventifs et de voyageurs pressés qui tuent le temps en attendant leur prochain train. Son travail achevé, elle se rend dans un bar lesbien pour y attendre son amoureuse qui la fait lanterner. De guerre lasse, à l’aube blanchissante, Simone rentre à pied chez elle. Un croupier en voiture (Michel Delahaye) s’arrête sur les Grands Boulevards pour la reconduire.

Simone Barbès est une curiosité post-soixante-huitarde sortie dans les salles en février 1980 et quasiment invisible jusqu’à sa restauration en 2018. Une unique salle parisienne l’a diffusé à un horaire incongru (le samedi à 11h50) devant un public clairsemé de cinéphiles hors du temps.

Le personnage de Simone Barbès a la gouaille des actrices d’avant-guerre et l’élocution d’une Arletty (la « Gauloise sans filtre ») ou d’une Suzy Delair. Le film a des airs de Nouvelle Vague crépusculaire. On imagine qu’il a été tourné avec un budget minimaliste – et une bande de potes – dans deux décors crapoteux : le hall d’un cinéma porno – comme il n’en existe plus depuis la VHS et Internet – et une boîte lesbienne dont je ne suis pas sûr qu’il en existe encore beaucoup avec son orchestre minable et sa boule à facettes.

Mathieu Macheret se pâme dans Le Monde évoquant « l’un des chefs-d’œuvre oubliés du cinéma français ». Je serais nettement moins dithyrambique, me bornant à lui reconnaître une seule qualité : sa concision – « toute racinienne » dit Macheret…. alors que j’ignorais que Racine eût jamais été concis.

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Slow ★★★☆

Elena, la trentaine, danseuse contemporaine, rencontre , à l’occasion d’un cours qu’elle donne à un groupe de  jeunes malentendants, Dovydas, interprète en langue des signes. Entre lui et elle, le courant passe et la séduction opère. Mais leur romance se heurte à la brutale confession de Dovydas : il est asexuel. Dovydas a beau aimer Elena, il n’a aucun désir sexuel pour elle. Elena doit avec lui inventer la grammaire d’une relation pour elle inédite, où l’amour et le désir ne se conjuguent pas nécessairement.

Slow s’empare d’un sujet à la mode, dont certaines revues grand public ont déjà fait leur une aguicheuse : l’asexualité. Soit, à rebours de la norme hétérosexuelle (encore ?) majoritaire, l’une des formes de sexualité alternatives, le A de LGBTQIA. À ce titre, Slow avait parfaitement sa place à la 30ème édition du Festival du film LGBTQIA &+++ de Paris
Chéries-Chéris en novembre dernier où il était projeté en avant-première.

À ma connaissance, le sujet n’avait pas encore été traité au cinéma et la jeune réalisatrice lituanienne Marija Kavtaradze a eu un sacré flair en s’en emparant. Elle le fait en inversant les rôles : c’est la femme ici qui est en demande sexuelle et c’est l’homme qui, à l’opposé des schémas patriarcaux, la réfrène.

Tourné à Hollywood, le film aurait raconté le lent apprivoisement de Dovydas par Lena, parsemé de quelques rebondissements, jusqu’à sa finale conversion à la norme hétérosexuelle scellée par un mariage en blanc devant leurs familles et leurs amis aussi soulagés qu’heureux. Slow a le bon goût et l’intelligence de nous éviter tous ces poncifs, jusqu’à son dénouement inattendu que je n’ai pas le droit de révéler. Pour un film sur l’asexualité, c’est un film étonnamment sexuel où l’on voit longtemps et souvent les deux amants couchés ensemble sans coucher ensemble. Ces scènes-là – qui, l’air de rien, interrogent les stéréotypes des scènes d’amour au cinéma – sont d’une étonnante sensualité.

Slow nous vient de Lituanie, un petit pays mal connu dont la production cinématographique est pourtant riche : Arūnas Žebriūnas, Šarūnas Bartas… La langue qu’on y entend y est délicieusement exotique, comme les prénoms des personnages (Dovydas !). Les deux acteurs sont remarquables : Greta Grineviciute, qui n’a pas les canons de la danseuse classique, explose de sensualité et Kęstutis Cicėnas est d’autant plus désirable qu’il se refuse.

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Jeunesse (retour au pays) ★☆☆☆

Retour au pays est le troisième volet d’une trilogie monstre, d’une durée totale de près de dix heures. J’avais vu le premier volet à sa sortie en janvier 2024, mais avais renoncé au deuxième en avril dernier.

La raison en était que j’avais trouvé le premier certes intéressant mais trop long (3h32). La durée du deuxième m’avait rebuté (3h47). C’est seulement parce que celle du troisième était plus comestible (2h32) et que les critiques étaient si élogieuses que je me suis fait violence pour le voir.

Je n’ai pas grand-chose à en dire de plus que je n’aie déjà dit dans ma première critique. Wang Bing a filmé pendant cinq ans, entre 2014 et 2019, les ouvriers d’une cité-dortoir du Zhejiang, près de Shanghai, spécialisée dans l’industrie textile. Souvent originaires de la « Chine de l’intérieur », ils sont employés dans une myriade de petits ateliers indépendants, répondant à la commande au plus bas prix.

Jeunesse dresse un portrait très dur de cette jeunesse-là, rude à la tâche, obsédée par le maigre salaire qu’un travail harassant lui permet de gagner, et par les moyens de ne pas le gaspiller trop vite, dans la boisson ou le jeu. Jeunesse a les qualités des grands documentaires : réussir, à partir de petits faits quotidiens captés sur le vif, à parler de l’universel, ici la condition ouvrière dans une société hyper-capitalistique.

Mais, à mes yeux, Jeunesse souffre d’un handicap rédhibitoire : sa durée. Je ne vois pas en quoi ses dix heures le servent. Je vois au contraire trop bien en quoi elles le desservent : pousser à bout la résistance du spectateur qui, passée la première heure, s’ennuie ferme, s’impatiente et/ou s’endort.

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Ragtime (1981) ★★☆☆

Une famille bourgeoise de New Rochelle, dans l’Etat de New York, au tout début du vingtième siècle, dont l’un des membres s’est amouraché d’une midinette, découvre dans son jardin un bébé noir abandonné. Le père du bébé, Coalhouse Walker Jr., un pianiste de ragtime, revient bientôt le chercher. Mais la Ford-T qu’il conduit est bloquée près d’une caserne de pompiers et endommagée. Coalhouse ne se remet pas de cet affront. Il exige réparation et s’engage dans une folle spirale de violence qui le conduira, avec une bande de complices, à se retrancher dans la Pierpont Morgan Library et à menacer de la faire exploser si le chef des pompiers qui l’a insulté ne lui présente pas des excuses.

Le ragtime est d’abord une musique populaire, ancêtre du jazz, jouée par des musiciens afro-américains au tout début du XXème siècle. C’est aussi le titre d’un roman historique écrit en 1975 par Edgar Lawrence Doctorow. Ce livre foisonnant entrelace plusieurs histoires, la principale étant celle de ce pianiste noir qui, comme le Michael Kohlhaas de Kleist veut que justice lui soit rendue, quel qu’en soit le prix. C’est bien le fil principal que finit par suivre le film, foisonnant lui aussi (il dure deux heures et trente cinq minutes) de Forman. Mais auparavant, il en avait tiré d’autres et nous avait entraîné sur de fausses pistes. En effet, plus que le livre, il donne une grande place au personnage d’Evelyn Nesbit dont le mari, à moitié fou, avait assassiné l’architecte Stanford White auquel il reprochait d’avoir eu une relation alors que sa femme était âgée de seize ans à peine.

Milos Forman ne lésine pas sur les moyens pour reconstituer luxueusement le New York de la Belle Époque, ses avenues grouillantes où les premières automobiles se faufilent au milieu des fiacres, ses bals endiablés où l’alcool coule à flot au son du ragtime des orchestres noirs. Il nous introduit à une galerie de personnages hauts en couleurs, le plus attachant n’étant pas hélas, le héros Coalhouse Walker Jr., mais plutôt la charmante Evelyn que l’histoire hélas délaisse en chemin.
On aurait aimé que le film garde sa structure chorale et continue, comme il l’avait fait dans sa première moitié, à nous balader d’un personnage à l’autre, d’une histoire à l’autre. Mais il fait le choix de se focaliser sur une seule histoire et sur le long siège de la Morgan Library par les forces de police dirigées par Rhinelander Walod qu’interprète dans son tout dernier rôle, à quatre-vingts ans passés, le légendaire James Cagney.

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Rock Bottom ★☆☆☆

En 1974, Robert Wyatt, qui vient d’entamer une carrière solo après avoir quitté le groupe Soft Machine, sort l’album Rock Bottom. L’année précédente, Wyatt, en état d’ébriété, était tombé du quatrième étage d’un immeuble londonien où se déroulait une soirée sous substances. La chute l’avait laissé paraplégique. Il avait déjà entamé la composition de Rock Bottom qu’il a achevé durant sa longue convalescence avec le soutien d’Alfreda Benge, une poétesse et une illustratrice, qui dessinera la couverture de la pochette. Robert et « Alfie » se marient le jour de la sortie de l’album.

Rock Bottom est « l’un des chefs-d’œuvre les plus originaux de l’histoire du rock » (Alain Dister). C’est un album de rock progressif à l’intersection du jazz et du rock. À l’occasion de son cinquantième anniversaire, la réalisatrice espagnole Maria Trénor lui donne une seconde jeunesse en prenant quelques libertés avec les faits. Elle fait tomber Wyatt d’un brownstone new yorkais et imagine que Bob et Alfie ont vécu ensemble à Majorque, aux Baléares – alors qu’ils ont ébauché les chansons de Rock Bottom à Venise où Alfie travaillait sur le film de Nicolas Roeg Don’t Look Now.

Maria Trenor utilise la rotoscopie qui consiste à filmer d’abord les acteurs en prises de vues réelles pour ensuite dessiner les contours des silhouettes, image après image. Elle nous entraîne dans une folle immersion psychédélique, zébrée d’éclairs surréalistes, censée retranscrire l’état de transe dans lequel la drogue puis les médicaments ont plongé Wyatt durant tout son processus créatif. L’effet est hypnotisant. Rock Bottom fait partie de ces films qu’on peut, qu’on doit regarder dans un état second, sans s’attacher à leur linéarité, en se laissant submerger par ses images et par un son envoûtant.

Ce n’est certainement pas ma came…. mais ça n’en est pas moins pour autant de la très bonne came.

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