La Romancière, le Film et le Heureux Hasard ★★☆☆

Une célèbre romancière retrouve dans un quartier excentré de Séoul une ancienne amie qui tient une librairie. Elle croise ensuite un réalisateur et sa femme, une jeune actrice de cinéma qui vient de décider de faire une pause dans sa carrière et, de retour dans la librairie de son amie, un vieux poète qu’elle avait connu de nombreuses années plus tôt.
Après cette journée riche en rencontres, elle décide avec la jeune actrice de réaliser un court métrage.

Six mois après son dernier film en date, Juste sous vos yeux, six mois avant la sortie de son prochain, Walk up, déjà diffusé en festival, le prolixe réalisateur coréen Hong Sangsoo est de retour sur les écrans avec sa vingt-neuvième réalisation.

Avec le masochisme qui me caractérise, j’en ai vu une bonne vingtaine depuis que ma belle-soeur me raconta avec hilarité l’état d’hébètement dans lequel l’avait laissée son tout premier, Le jour où le cochon est tombé dans le puits (ex aequo à l’Index familial avec Khroustaliov, ma voiture !).

Le cinéma de Hong Sangsoo m’a fait passer par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. J’ai d’abord salué la fraîcheur de ce « Rohmer coréen » – l’expression a tellement été utilisée que je ne devrais la mentionner qu’en rougissant. Puis, très vite, je me suis lassé de ses dispositifs répétitifs : des rencontres hasardeuses  dans les rues de Séoul et de longs dialogues vite brouillés par les vapeurs de l’alcool avec de brusques ellipses qui en rendaient la compréhension malaisée. Cette lassitude a ensuite laissé la place à l’irritation : j’ai même reproché à Hong Sang soo de se ficher de nous avec son stakhanovisme, ses scénarios indigents, ses zooms épileptiques (Introduction). Et finalement, je suis revenu à un jugement plus mesuré.

À quoi est due cette évolution vers plus d’aménité ? Le cinéma de Hong Sangsoo a-t-il changé ? La soixantaine approchant, il se serait lesté de sujets plus graves comme dans Hotel by the River ou dans Juste sous vos yeux. Mais surtout, me semble-t-il, je me suis lentement mais sûrement accoutumé à sa grammaire. Comme le café sans sucre que j’ai d’abord trouvé insupportablement amer avant de m’y habituer – au point de ne plus tolérer de le boire sucré – j’ai fini par me faire au cinéma de Hong Sangsoo.

Je lis ici ou là des critiques cinglantes de La Romancière…. Je les comprends volontiers car j’aurais pu les signer au mot près : scénario inconsistant, noir et blanc sans poésie, personnages sans relief, plans fixes interminables, etc.
Pour autant, je ne les ferai pas miennes. Car j’ai pris un certain plaisir à ce film, comme celui que l’on prend à prendre un verre avec un vieil ami dont on aurait cessé de réprouver les défauts les plus irritants.

La bande-annonce

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