Saigneurs ★★☆☆

Raphaël Girardot et Vincent Gaullier ont filmé pendant un an le travail quotidien des cent employés d’un abattoir industriel breton.

Âmes sensibles s’abstenir. Il faut avoir le cœur bien accroché – et l’estomac vide de préférence – pour passer plus d’une heure trente dans un abattoir à regarder des vaches et des agneaux assommés, saignés, éviscérés, découpés, désossés.

Il y a deux lectures possibles de ce documentaire selon le sens que l’on donne à son titre volontairement polysémique.

Le premier est une dénonciation de l’abattage industriel et du traitement réservé aux animaux dont la viande est destinée à la consommation humaine. On ne regardera pas son bifteck de la même façon après avoir vu « Saigneurs ». Certains employés font d’ailleurs en riant la confession de leur conversion au végétarisme.

Mais l’essentiel du film n’est pas là. Patients ne fait pas le procès de l’industrie agro-alimentaire comme le faisait par exemple We Feed the World de Erwin Wagenhofer ou Meat de Frederik Wiseman. L’objet principal de ce documentaire est moins les bêtes saignées que ceux qui les saignent.

Saigneurs est un documentaire sur le travail à l’usine. Une sorte de Les Temps modernes vegan. Ses héros sont les employés de cette entreprise qu’on suit dans leurs geste quotidiens et répétitifs. Ils travaillent à la chaîne dans un bruit assourdissant, dans une odeur qu’on devine pestilentielle. Leur harnachement est impressionnant : long tablier blanc, casque de chantier, gants, cotte de maille…

Sans doute, leurs conditions de travail sont-elles éprouvantes. En 2013, Entrée du personnel de Manuela Fresil instruisait le procès à charge du travail à l’abattoir – sans en franchir les portes. On est bien sûr impressionnés par les cadences, le bruit, le sang. Mais on l’est aussi par le modernisme des appareils, par l’efficacité des instruments, par le respect maniaque des consignes de sécurité. Et on se dit que le travail, aussi exténuant soit-il, devait l’être autrement plus il y a quelques années.

La bande-annonce

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