Mon tissu préféré ★☆☆☆

En mars 2011, la Syrie plonge inexorablement dans la guerre civile. Nahla vit dans un petit appartement de Damas avec sa mère et ses deux sœurs cadettes. Elle exerce un petit boulot dans un magasin de prêt-à-porter et rêve d’une autre vie. Sa mère a organisé pour elle un projet de mariage avec un compatriote expatrié aux États-Unis. Mais leur rencontre tourne au fiasco et le fiancé lui préfère sa sœur.
Pour s’évader, Nehla se réfugie chez une voisine, Madame Jiji, qui vient d’ouvrir une maison close.

Projeté à Cannes en mai dernier dans la section Un Certain regard, Mon tissu préféré est l’œuvre d’une réalisatrice syrienne, réfugiée en France depuis 2012, qui tente sans succès de traiter de front deux sujets.

Le premier est l’émancipation d’une jeune femme. Le second est la guerre civile qui déchire le pays. Le problème est que ces deux sujets ne résonnent guère. C’était d’ailleurs le défaut l’an passé de Une famille syrienne, huis clos théâtral qui mettait en scène plusieurs familles coincées dans un appartement sous les bombes. Que la tragédie que vit son pays puisse bouleverser la réalisatrice est légitime. Mais qu’elle en fasse l’arrière-plan obligé de son film, comme si taire ce contexte dramatique serait trahir ses origines, n’est pas indispensable.

Car que le film se déroule dans un pays au bord de la guerre civile ou pas ne change pas grand chose au trouble de Nahla. Elle vit les tourments, mille fois filmés, de la sortie de l’adolescence, de l’entrée dans l’âge adulte, de la découverte de la sexualité, du départ à la fois désiré et redouté du nid familial. D’ailleurs cette émancipation n’est pas surdéterminée par son milieu : on sait gré à Gaya Jiji de nous avoir évité les lieux communs sur la femme arabe et son asservissement. Ce qui advient à Nahla, qui vit tête nue dans une ville où le voile n’est pas de rigueur et n’est nullement contrainte à un mariage qu’elle ne veut pas, pourrait advenir à n’importe quelle jeune fille sous n’importe quelle latitude.

On en revient à Nahla et à ses émois. Ils sont étrangement inaboutis. C’est d’ailleurs peut-être une preuve d’authenticité. Sauf que cette authenticité passe mal. Son personnage, pas vraiment sympathique, ne suscite guère d’empathie ; ses atermoiements lassent bientôt. On ne sait pas où elle va. Du coup, on n’a guère envie d’y aller avec elle.

La bande-annonce

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