Chroniques de Téhéran n’est pas un documentaire, même si son sujet s’en rapproche, mais un film de fiction. Il est composé de neuf saynètes toutes filmées selon un protocole identique. On y voit un seul personnage, en plan américain comme le montre son affiche. On comprend bientôt qu’il s’agit d’une galerie d’Iraniens et d’Iraniennes filmés aux différents âges de leur vie. Ils sont confrontés à un interlocuteur invisible, un détenteur d’une autorité exercée sur eux avec violence et arbitraire : un père de famille se voit refuser d’enregistrer son enfant sous le prénom de David au motif qu’il véhiculerait une influence étrangère, une conductrice de taxi doit acquitter une amende pour avoir conduit sans hijab, un réalisateur est contraint de dénaturer son scénario s’il veut obtenir le visa de la censure, etc.
Le procédé pourrait devenir répétitif. Chroniques de Téhéran a l’intelligence de durer une heure et dix-sept minutes seulement et évite ainsi la lassitude qu’il aurait pu faire naître.
Il est diablement efficace. Chaque scène est étouffante sinon irrespirable – ainsi de celle d’une gamine ravissante obligée de cacher sa splendide chevelure rousse dans un hijab informe. La question du port obligatoire du voile revient régulièrement, comme celle de la norme ou de la normalité à laquelle chaque personnage est renvoyé. Chacun aspire à une petite parcelle de liberté qui lui est refusée par une autorité arbitraire. Le seul moyen d’en échapper, comme le fait la lycéenne menacée par sa directrice d’être dénoncée à son père, est d’entrer dans son jeu et d’utiliser les mêmes armes qu’elle.
Tourné au nez et à la barbe (!) des mollahs, Chroniques de Téhéran ne se réduit toutefois pas à un procès à charge contre le régime iranien. La société totalitaire qu’il décrit, qui enserre chaque citoyen dans les limites indépassables de ce qui lui est autorisé et de ce qui lui est interdit pour chaque geste de la vie quotidienne, n’est d’aucun lieu ni d’aucun temps. L’entretien d’embauche que subit une jeune femme sur qui son futur employeur entend exercer son droit de cuissage, l’examen humiliant d’un homme obligé de se dénuder devant le fonctionnaire censé lui délivrer son permis de conduire sont deux situations qui pourraient survenir n’importe où.
une batterie d’iraniens et iraniennes » !!!
La formule n’est pas jolie ! Dommage car le reste est si bien écrit. … hâte de voir ce film