Antoine (Vincent Lacoste) a eu beau travailler jour et nuit, il triple sa première année après avoir échoué d’un cheveu à obtenir la dernière place en médecine offerte par le numerus clausus. Au début de la nouvelle année, il rencontre sur les bancs de la faculté un jeune bachelier Benjamin (William Lebghil) qui ne semble pas mesurer l’ampleur de la tâche mais se révèle très vite redoutablement doué.
Vous êtes médecin/normalien/énarque ? vous avez passé entre 18 et 22 ans les quatre années les plus traumatisantes mais aussi les plus enrichissantes de votre vie ? vous avez consommé plus de Guronsan et de boules Quies que d’ecstasy dans les soirées et de bouchons anti-bruits dans les concerts ? vous avez les mains moites en regardant Questions pour un champion ? vous faites des cauchemars en vous imaginant redoubler ? Première année est pour vous qui raconte, comme peu de films l’ont fait, une histoire difficile à filmer, mais qui est le lot commun de nombreux étudiants qui sacrifient leur vie – amicale, amoureuse, culturelle – pour décrocher le Graal du concours hypersélectif.
En tout état de cause, vous avez aimé Hippocrate ou Médecin de campagne, les précédents films de Thomas Lilti, un ancien médecin passé à la réalisation ? Vous apprécierez cette nouvelle plongée dans le monde des carabins, même si on y perd de vue la noblesse de ce métier et la belle humanité qui s’y déploie.
Si vous avez encore des hésitations, jettez un œil à la bande annonce. Et laissez vous séduire par sa communicative énergie.
Le problème de Première année est qu’il n’a pas grand chose de plus à offrir que cette bande annonce. Filmer des étudiants qui étudient est ingrat. Et Thomas Lilti se refuse, à raison, à agrémenter ce récit d’histoires annexes qui ne lui auraient rien apporté. Pas d’amourettes – sinon une voisine de palier chinoise (ou philippine ?) avec qui Benjamin partage un café à ses heures perdues. Pas de drames familiaux, sinon des parents inquiets de voir leurs progénitures se dessécher dans des études épuisantes. Bref, des étudiants qui vont en cours, en bibliothèque, au resto U, en révisant, révisant, révisant encore.
En creux bien sûr se dessine une critique cinglante de ce bourrage de crâne imbécile, de ce mode de sélection absurde qui recrute des médecins sur leur capacité à remplir des QCM et non à soigner des patients. Mais le sujet du film n’est pas là. Il n’a d’autre ambition que de nous faire partager le quotidien de deux étudiants dans un tunnel de révision.
Vincent Lacoste (25 ans) et William Lebighl (28 ans) sont peut-être un peu trop vieux pour rendre tout à fait crédibles des étudiants de première année. Mais leurs personnages posent un autre problème plus délicat. Le premier est censé incarner l’étudiant d’origine modeste, obligé à des allers-retours épuisants en banlieue. Le second au contraire a un père chirurgien, camarade de promo du doyen de la faculté, et s’est vu payer une chambre à une encablure de l’université. Le second maîtrise les codes ; le premier ne les maîtrise pas. Or, les études de médecine, leurs critères de sélections, en première année au moins, sont sans doute les cursus qui prêtent le moins le flanc à la critique bourdieusienne, à la différence d’autres parcours où l’oral, la manière d’être, de s’exprimer ont autrement d’importance.