Cyril contre Goliath ★★☆☆

Pierre Cardin a décidé de privatiser le petit village de Lacoste dans le Lubéron. Il a commencé à financer gracieusement la restauration de son vieux château. Jusque là, rien à dire. Mais il a ensuite racheté une à une les maisons du bourg, le vidant lentement de ses habitants et de ses rares commerces.
Face à ce Goliath sans morale se dresse Cyril Montana. Parisien, la cinquantaine, il a passé toute son enfance à Lacoste qui, dans les années 70-80, était peuplé par une communauté cosmopolite de hippies libertaires. Il refuse le sort de son village et, après avoir réfléchi à la meilleure façon d’agir, décide de mobiliser l’opinion publique. La réalisation d’un documentaire racontant sa lutte fait partie de son plan d’action. Après avoir accumulé les refus, il rassemble le financement de son documentaire sur une plate-forme de crowdfunding.

Cyril contre Goliath tenait un sujet en or, manichéen à souhait, qui met face à face, comme dans les premiers documentaires de Michael Moore ou dans Merci patron ! qui lança la carrière politique de François Ruffin, un ignoble capitaliste, suintant le mépris de classe, avec un valeureux prolétaire, armé de sa seule énergie et de son humour.

Il suscite une réflexion très stimulante sur la mobilisation collective, un sujet à la mode aux temps de Occupy Wall Street, de Nuit debout et des Gilets jaunes : comment mobiliser le corps social ? comment attaquer un ordre qu’on juge illégitime ? comment faire changer les choses ? en restant dans les limites de la légalité ? en violant la Loi ?

Ce qui est le plus attachant est la modestie et l’auto-dérision dont Cyril Montana sait faire preuve. À la différence d’un Ruffin que la modestie n’étouffait pas, Montana se moque de tout et avant tout de lui-même. Organise-t-il une marche collective, façon Gandhi, de Paris à Lacoste, la caméra de Thomas Bornot le suit, solitaire, le sac à l’épaule, rincé comme un chien errant, sur les routes de France, accompagné seulement par son fils… qui l’abandonne en gare de Fontainebleau. Invite-t-il tous les habitants de Lacoste à une assemblée générale ? la caméra filme encore une assemblée vide, réduite à quatre participants.

Cyril contre Goliath est un documentaire attachant qui, à partir d’un cas d’école ubuesque – la privatisation d’un petit village provençal – nous fait réfléchir avec un Don Quichotte plein d’énergie à la mobilisation collective et à ses limites.

La bande-annonce

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